Beledo : Seriously Deep

Beledo : Seriously Deep

MoonJune Records

Beledo, musicien uruguayen installé à New York, guitariste virtuose et également excellent pianiste, nous présente son sixième album personnel (le deuxième enregistré pour le label new-yorkais MoonJune Records, après « Dreamland Mechanism » de 2016). Comme pour tout artiste enregistrant pour ce label, Beledo nous propose un jazz-rock-fusion-prog à très haut niveau de technicité et majoritairement instrumental. Cette nouvelle œuvre débute par la plage titulaire, une relecture modernisée d’une des compositions les plus fortes d’un des albums majeurs d’Eberhard Weber (« Silent Feet » de 1978). Les partitions, à l’origine interprétées au saxophone soprano par Charlie Mariano, le sont ici de façon magistrale par la six cordes de Beledo (qui n’est pas sans rappeler le travail d’un Allan Holdsworth), accompagné par une section rythmique de rêve : le bassiste Tony Levin (doit-on encore le présenter ? Il est plus difficile de répertorier des musiciens avec lesquels il n’a pas joué que l’inverse… Il est actuellement actif chez King Crimson et Stick Men) et le batteur Kenny Grohowski (présent chez John Zorn, Markus Reuter, le tout nouveau PAKT et, jusqu’il y a peu, soit jusqu’au décès du membre fondateur, le guitariste John Goodsall, chez Brand X). Sur ce titre, on retrouve également un des amis uruguayens de Beledo, le vibraphoniste Jorge Camiruaga, avec lequel il a partagé de nombreuses expériences musicales (groupe de fusion, nombreux concerts en duo et un amour mutuel pour ce disque d’Eberhard Weber depuis sa parution). Après ces 14 premières minutes, Beledo nous propose six compositions personnelles, toutes d’un haut niveau, dont on retiendra les deux chantées : « Mama D » et « A Temple in the Valley », interprétées respectivement par la chanteuse botswanaise Kearoma Rantao et le chanteur italien Boris Savoldelli. Ces deux morceaux, et la volonté constante de Beledo d’avoir des mélodies fortes, sont la preuve que cette musique peut dégager une grande sensibilité, qu’il ne s’agit absolument pas d’une musique faite uniquement pour techniciens de leur instrument, ce qui serait profondément ennuyeux et nombriliste. Un régal pour les amateurs du genre.

Sergio Liberati