Csaba Palotaï, Simon Drappier, Steve Argüelles : Sunako
Le batteur britannique Steve Argüelles a joué dans une multitude de projets à géométrie variable. Le voici au sein d’un trio singulier comprenant deux guitaristes : le hongrois Csaba Palotaï et le Français Simon Drapier, souvent crédité à la contrebasse ou à l’arpeggione, qui utilise ici une guitare baryton. Le son du trio est en outre sculpté par des effets électroniques concoctés par Simon ainsi que par le batteur qui utilise un synthétiseur Omnichord et un vocoder pour trafiquer la voix (sur « Ricera »). Les sonorités sont brutes, les rythmes tribaux et les compositions marquées par un minimalisme innervé par l’électricité. On est souvent proche de la transe dans une perspective « world » plus que jazz. Le titre de l’album, « Sunako », qui signifie « l’enfant du sable », aurait pu nous mettre sur la voie : ce disque est une transposition instrumentale de la musique du désert qui inclut les principaux ingrédients évoqués plus haut.
Les guitares résonnent comme dans les années 60, quand la réverbération était reine au temps de Nokie Edwards avec les Ventures. Des titres comme « Buckboard » ou « The Trail » évoquent Afel Bocoum en plus moderne, sans les njarkas et autres ngonis traditionnels remplacés par des boucles électroniques, mais l’esprit est le même. On y trouve aussi quelques vibrations bluesy à la malienne, la musique du Sahel étant, comme on le sait, reliée historiquement à son cousin américain, sans qu’on ne sache trop aujourd’hui qui a le plus influencé l’autre. Enfin, une autre référence qui vient à l’esprit est celle du trio de Houston, Khruangbin, dont la musique lancinante, répétitive, nomadique et également imprégnée d’électronique évolue entre surf-rock psychédélique, funk et « Sahara blues » (ils ont notamment enregistré un album avec le fils d’Ali Farka Touré). Si vous aimez ça, sachez que les solos de guitare sont quand même nombreux et que les morceaux sont si hypnotiques qu’on ne prête guère attention aux changements d’accords.