Eric Legnini, Six Strings Under

Eric Legnini, Six Strings Under

Eric Legnini, Six Strings Under

ANTEPRIMA PRODUCTIONS

Pianiste surdoué, Eric Legnini a très vite été adoubé par Jacques Pelzer (album “Never Let Me Go”) et a enregistré ses premiers disques personnels en trio avec Jean-Louis Rassinfosse (contrebasse) et Stéphane Galland (batterie) : “Essentiels”, avec, en invités, Pierre Vaiana, Fabrizio Cassol et Michel Massot; “Natural Balance” et “Antraigues”. Il enregistre aussi “Rhythm Sphere” avec le saxophoniste Joe Lovano. A Bruxelles, il rencontre Stefano Di Battista (saxophone) et Flavio Boltro (trompette). Il les suit à Paris (album “Volare”). Dans la ville lumière, la carrière du Hutois prend une autre dimension et une autre direction avec “Miss Soul” et “The Big Boogaloo” : “Depuis 2 ou 3 ans, je suis aussi producteur de hip hop, grâce à cette musique, je pense revenir vraiment aux sources, j’écoute beaucoup de soul, avec des pianistes comme Les Mc Cann, Junior Mance ou Ray Briant.” (interview Jazzaround, n°21, 2006). Puis vient le triptyque “The Vox”, “Sing Twice” et “Waxx Up”, avec une série de vocalistes dont Hugh Coleman. Avec “Six Strings Under”, titre clin d’œil à la série Six Feet Under, Eric Legnini revient à une musique purement acoustique : une formation sans batteur et avec deux guitaristes : “L’équilibre piano-guitare n’est pas facile à trouver parce qu’on a un peu les mêmes registres, le même rôle dans les groupes. Mais, j’ai quand même connu différentes expériences de ce type : avec Christian Escoudé, Philip Catherine, Jacques Pirotton ou Fabien Degryse. La répartition des rôles entre piano et guitare est assez délicate mais ces rencontres se sont toujours bien passées.” (interview Jazzaround, n° 13, 1998). C’est encore le cas ici, avec Hugo Lippi et Rocky Gresset. Né en Angleterre en 1977, Hugo Lippi arrive à Paris en 1998. Il fait partie du quartet du trompettiste Fabien Mary, enregistre “Who Cares” avec Florent Gac à l’orgue, participe à un hommage à Django au Sunside et joue en quartet avec Fred Nardin au piano. Né en 1980 au sein d’une famille gitane, Rocky Gresset découvre la musique de Django à 13 ans, puis se passionne pour Wes Montgomery. Guitariste autodidacte, il se forme au rythme des rencontres : il croise Christian Escoudé, joue avec les frères Belmondo puis enregistre avec le violoniste Costel Nilescu et Diego Imbert. “Rocky ne lit pas la musique, il joue tout d’oreille. On a passé beaucoup de temps ensemble pour que je lui apprenne les morceaux. C’était un work in progress très enrichissant” (Eric Legnini). Pour compléter la formation, le Hutois retrouve le contrebassiste Thomas Bramerie qu’il avait déjà croisé pour “The Vox” et “Sing Twice”. Au répertoire, un classique (le très swing Stompin’ At The Savoy), une reprise de David Bowie (une version très intimiste de Space Oddity jouée sans les guitares) et neuf compositions originales qui explorent les différents registres de la guitare, des senteurs afrobeat de Boda Boda aux rythmes chaloupés de la bossa (La Mangueira, du nom d’un quartier de Rio, un thème dédié à la chanteuse Marcia Maria). L’album s’ouvre sur un train d’enfer avec Boda Boda, avec un beau solo de guitare. Beaucoup d’autres compositions s’apparentent plutôt à des ballades au charme mélodique très prenant : Doo We Doo, Breakfast At Dawn, Eterna gioventu ou Night Birds. D’autres plages adoptent un rythme très vif, tout en gardant n thème mélodique limpide, comme Daydreaming ou The Jive avec référence à la danse swing des années 1930. Un autre retour aux sources. Sous l’emprise de mélodies qui permanent longtemps dans l’oreille, on ne peut s’empêcher de se remémorer les duos réunissant Bill Evans et Jim Hall : l’osmose entre piano et guitare est parfaitement aboutie. Autre gage de grande qualité, l’album a été enregistré au studio La Buissonne de Pernes Les Fontaines qui a vu défiler la crème du jazz mondial, grâce à l’oreille experte de Gérard de Halo. A quand une invitation en Belgique ?

Claude Loxhay