FMR Orchestrâ : Jusqu’où s’évapore la musique ?
Altrisuoni / L’Autre Distribution
Fondé par le guitariste français Jérôme Lefebvre, le FMR Orchestrâ (sic) regroupe six musiciens talentueux qui se sont mis au service des compositions du leader. Les quatorze plages de « Jusqu’où s’évapore la musique ? » sont organisées en une longue suite ininterrompue d’une heure, les morceaux les plus longs étant occasionnellement reliés entre eux par des interludes ouverts intitulés « transitions ». L’esthétique est diverse tandis que la musique flottante, parfois mystérieuse comme une eau stagnante, procure un étrange sentiment d’intemporalité, spiralant lentement en volutes éphémères. Les textures sont multiples et reflètent la diversité des instruments utilisés. De beaux solos viennent s’incruster au fil des plages comme la clarinette de Loïc Vergnaux sur « À Courbet », la guitare électrique de Jérôme sur « Le Petit Matin Du Peintre » et sur « Strange Feeling », la trompette de Timothée Quost sur « Yves », et le saxophone de Guillaume Orti (entendu jadis au sein de l’orchestre Octurn de Bo Van der Werf) sur « Strange Feeling » … Globalement, les tempos sont contenus et les structures ont été voulues fluides et assez lâches pour permettre l’inclusion de chorus spontanés. La suite se referme avec le long « Bordello Con Expressividad » au titre explicite : la musique y paraît encore plus flexible qu’ailleurs, mais sans pour autant tomber dans le jazz libre, encore qu’au milieu du morceau, on s’y croirait presque avec un moment jouissif de déstructuration organisée qui débouche sur un long solo de batterie de Daniel Jeand’heur. Située quelque part à la frontière osmotique entre classique, musique contemporaine et jazz moderne improvisé, cette œuvre interpelle par son grain de folie créatrice, son imprévisibilité et une belle dose d’imagination.