Jean My Truong & Friends : Sun Is Back
Faut-il encore présenter Jean My Truong ? Ce batteur français d’ascendance vietnamienne a collaboré à quelques groupes de free-jazz et de fusion progressive qui, dans les années 70, ont fait, en France, la joie des amateurs : Perception avec le saxophoniste Yochk’o Seffer, Surya avec le violoniste Didier Lockwood, et surtout le mythique ZAO avec Seffer et le pianiste François Cahen. Même si dans les décennies suivantes, Jean My Truong a souvent flirté avec le rock et la variété (Indochine, Alain Bashung…), il resté proche du jazz, enregistrant ces dernières années quelques albums qui ne sont pas passés inaperçus : « Mémoire du futur » en 2008, avec la collaboration de Stéphane Guillaume et Pierre de Bethmann ; un hommage à Miles Davis avec « The Blue Light » en 2011 ; et, en 2016, « Secret World », un album de jazz-rock mélodique aux subtiles influences indiennes. Musicien plutôt discret, le voici de retour six années plus tard avec « Sun Is Back », composé pendant le confinement, qui offre une musique agréable, multicolore et riche de la contribution de plusieurs musiciens éparpillés sur la planète.
Dans la lignée de ses productions précédentes, le batteur, accompagné de son trio (Leandro Aconcha au piano et Pascal Sarton à la basse) augmenté du bugliste Sylvain Gontard, délivre treize nouvelles compositions légères, douces, aux mélodies évidentes, qui offrent des espaces d’improvisation aux nombreux artistes invités. Pas moins de trois guitaristes ont ainsi été conviés à collaborer : Hristo Vitchev, étoile montante de la six-cordes d’origine bulgare mais basé en Californie, qui impressionne par un jeu particulièrement fluide sur « Magic Road » ; Juan Carmona, guitariste de flamenco, qui illumine le morceau « La gachi » avec des sonorités rappelant le grand Paco de Lucia, et le virtuose Antoine Boyer, spécialiste du jazz manouche, mais qui adopte ici une approche plus éclectique (« New Cycle »). Sur « Travel Book », la ligne de basse groovy est jouée par Étienne Mbappé tandis que les influences indiennes deviennent plus marquées sur « Indi Joy » avec le violoniste Neyveli Radhakrishna. Aux baguettes, Jean My Truong encadre tout ce beau monde avec autant de souplesse que de sobriété, guidant sa formation avec une assurance tranquille qui est la griffe de ses derniers albums.
La sérénité de ce disque est à fleur de peau dans le très beau « Memory of Joy » illuminé autant par les vocalises aériennes de Nicki Wells que par le solo de guitare d’Etienne Boyer. Tout ça compose un répertoire aux saveurs variées mais qui reste très cohérent dans son approche globale. Ainsi, comme le suggère une pochette au graphisme très ordinaire, voilà que le soleil fait enfin son retour après deux années de pénombre et de claustration et, ma foi, cette musique solaire convient fort bien pour célébrer l’évènement.