Julien Tassin & Patrick Steenaerts : Duality

Julien Tassin & Patrick Steenaerts : Duality

Ramble Records

Après une série d’albums en solo très réussis, Julien Tassin s’associe à Patrick Steenaerts, un autre guitariste belge, pour un album en duo offrant huit nouvelles compositions et deux reprises plutôt inattendues, l’une d’un titre de Brian Wilson, « Caroline No » qui figure sur le légendaire « Pet Sounds » des Beach Boys, et l’autre de la « Gymnopédie n°1 » d’Erik Satie réarrangée pour deux guitares. Souvent, dans ce genre de duo, l’un improvise et l’autre « solote » à tour de rôle, mais dans ce cas-ci la musique résulte plutôt d’un entrelacement quasi permanent des deux instrumentistes dont les riffs, les accords, les chorus et les contrechants, placés sous le signe de la stimulation réciproque, se recouvrent, s’entrecroisent et dialoguent avec autant d’allant que de générosité. Difficile d’étiqueter cette musique qui s’abreuve à différentes sources, du classique au jazz en passant par un certain rock instrumental, parfois marqué par un son « twang » électrique qui renvoie aux années 60 (The Ventures et autres groupes de surf music) ,mais aussi, plus récemment, au Bill Frisell de « Guitar in the Space Age » ! Au niveau sonore, c’est également à un véritable festival qu’on assiste ici : guitares acoustiques et électriques, à six et douze cordes, sans et avec effets (écho, réverbération, distorsion, vibrato …), les combinaisons sont multiples pour le plaisir des oreilles. Comme dans les disques en solo de Julien, cet album tente d’installer pour chaque morceau une atmosphère différente : des « soundscapes » angoissants de « Chasm » au lyrisme tout en dentelle de « Compassion », des abstractions de « Distorted » à l’atmosphérique « Azur », du classique minimaliste revisité de la « Gymnopédie » de Satie à la mélodie pop du titre éponyme, l’inspiration lézarde sur des pièces musicales aussi diverses et inattendues qu’expressives et inspirantes.

Liberté et complicité sont les maîtres mots de cet album qui transcende les genres et les conventions : pas de standard ni de duel de six cordes et encore moins de démonstration technique ici. Juste deux musiciens complices qui jouent sur un pied d’égalité en créant une musique fraîche et personnelle. Que ce soit sur le plan des compositions, des sonorités ou des interprétations, cette « Dualité » entre deux amoureux de la guitare aura vraiment été l’occasion de toutes les audaces.

Julien Tassin en trio à Flagey, Bruxelles, le 17 octobre.

Pierre Dulieu