Pépites, Around Jazz…
Around Jazz… quelques pépites.
C’est du jazz, … mais pas tout à fait non plus… Voici une collection de disques qui méritent qu’on leur rétrocède une oreille très attentive.
Nai Palm, Needle Paw
Nai Palm (que vous pouvez aussi prononcer Naomi Saalfield) détient entre les pognes les meilleures cartes de l’atout. Et même un peu plus : quelques as pour compléter un jeu qui lui permettra de gagner la partie sans aucune difficulté ! C’est indéniable, elle peut compter sur le soutien indéfectible de son label, qui a cassé sa tirelire pour lui assurer une campagne publicitaire rarement vue à ce niveau-là. Elle peut par ailleurs s’appuyer sur la notoriété de son groupe de nu soul, Hiatus Kaiyote (nominé en 2013 aux Grammy Awards) et sur l’admiration que lui vouent quelques pointures du sampler international (Kendrick Lamar, Drake, …) Enfin, et surtout, Nai Palm est dotée d’un talent fou ! (son valet d’atout…). Pour nous séduire, il ne lui faudra pas grand chose. Une voix (surtout), à la texture, au registre et à la justesse impressionnants ! Mais aussi quelques overdubs (les voix se multiplient) et un jeu de guitare dont elle semble être la seule à maîtriser le mode d’emploi. “Needle Paw” – son premier album en solo – est constitué de six nouveaux titres, mais aussi (et principalement) de relectures personnelles de quelques joyaux enregistrés sous l’ère Hiatus Kaiyote, et d’une poignée de reprises méconnaissables, triées sur le volet (Radiohead, Hendrix et Bowie). Ses chansons en forme de complaintes vagabondent entre une soul et un jazz improbables, voire inouïs… On adhère à 100%, et on vous conseille vivement l’écoute de ce disque à l’originalité bavarde !
Snowdrops,
Live at the Archaeological Crypt of Paris
A la veille du concert exceptionnel « Traversée en solitaire » que Christine Ott nous offrira à l’An Vert de Liège ce 30 mars (un événement Jazz Around), il nous a semblé intéressant de revenir un instant sur ce « Live » de Snowdrops, un projet de type néo-classique que l’ondiste strasbourgeoise partage avec le claviériste Mathieu Gabry. Ce concert-ci s’est tenu en septembre 2017, dans la Crypte archéologique de l’île de la cité, sous le parvis de la Cathédrale Notre-Dame de Paris. Le duo répondait ainsi à l’invitation des organisateurs du festival « Les Traversées du Marais » qui fêtait pour l’occasion sa troisième édition et dont cet enregistrement (disponible uniquement en format download) est le témoignage. On devine que les lieux investis par les machines ont imposé le respect du quasi-silence. Il ne sera en effet guère question de mélodies et encore moins de rythmes. Au contraire, les comparses ont composé un univers qui alterne les envolées aériennes oppressantes ou apaisantes, insufflées par les Ondes Martenot et les synthétiseurs. Une belle cérémonie nuptiale en somme.
Mephiti from Erik Bogaerts on Vimeo.
Mephiti, Mephiti
Le concept Mephiti s’articule autour du saxophoniste gantois Erik Bogaerts, par ailleurs leader au sein de la formation de jazz ambient Llop. La musique de ce sextet atypique (outre le saxophone et la section rythmique, on note la présence de deux guitaristes et d’une harpiste) se meut doucement, par petits pas et par petites touches, dans un climat quasiment dub, chuchotant l’éloge de la lenteur. On imagine facilement chaque musicien, recroquevillé et concentré sur son instrument, dont il tire des sons personnels qui construiront patiemment l’édifice. Ici, il n’y aura aucune envolée. La section rythmique est volontairement discrète, les soli d’Erik Bogaerts sont soufflés tout en retenue. La musique de Mephiti, aussi belle soit-elle, ne se vit pas : elle se subit, en ce sens qu’elle exige de l’auditeur un lâcher-prise profond. Ce parcours sans destination précise si ce n’est l’aventure, est à suivre sans modération à Malines, le 18 mars, à Anvers le 22 mars, à l’An Vert (Liège), le 23 mars et à Lokeren le 24 mars.
Grégory Sallet 5tet,
Le mouvement crée la matière
Le tempo, les sonorités et les compositions relèvent clairement de l’univers du jazz. A moins que ce ne soit du rock ! En fait, on n’en sait plus rien. Par la seule présence du violoncelle sur trois titres, on pourrait ajouter la musique de chambre parmi les références. Vous le voyez, « Le mouvement crée la matière » (une citation que l’on doit à l’écrivain lyonnais Alain Damasio) stagne entre deux ou trois eaux différentes. A défaut d’hésitation, on penchera pour la fusion des genres. Il n’y a de fait rien de désagréable à écouter un album qui ne prend pas de direction claire et définie. La musique de Grégory Sallet reflète les influences hétéroclites de son auteur. Ceci dit, s’il existe bien un fil rouge présent tout le long de l’album du saxophoniste grenoblois, c’est le groove, présent sur chacune des plages. Groove et éclectisme : on adore ça !
Joseph « YT » Boulier