Tania Giannouli Trio : In Fading Light
« Mais où sont passées les lumières / Qui nous guidaient ? / Peut-être étions nous trop fiers / Pour baisser la tête. » (Gérard Manset). Qu’est-il advenu de ce fin halo qui entourait autrefois la lumière qui nous guidait ? Disparu lui aussi. Abandonné, à l’image de la piscine que l’on aperçoit sur la pochette de cet album, symbole d’une déchéance économique brutale qui a frappé la Grèce de plein fouet. Une Grèce qui se relève péniblement, qui reprend lentement le cours de son histoire. Autour de cette piscine, la nature a repris ses droits, la végétation pousse en abondance. Dès la magnifique plage d’ouverture, « Labyrinth », la musique du nouvel album de la pianiste Tania Giannouli nous enveloppe. Une main gauche pour une mélodie minimaliste, répétitive, puis le frottement des doigts sur les cordes d’un oud et enfin, le souffle léger d’une trompette. Car il faut le préciser : le trio formé ici n’est pas conventionnel. On était curieux de vérifier si cet assemblage pouvait tenir la route sur la durée de ce disque, une heure et quelques poussières… On est conquis d’emblée. Et ce plaisir se renouvellera avec ses atmosphères cinématographiques (« Ingravida », « No Corner », « Night Flight », …) entrecoupées d’interludes de longueurs variées (« Fallen », « Moth » en oud solo). Arrosées de ces lumières pâles, toutes ces mélodies-là semblent être si belles ! Douze compositions signées de la seule plume de Tania Giannouli qui a su, avec ses deux complices, nous transporter en territoires aventureux. Plutôt que de parler d’influences, nous utiliserons le terme « références » : la Méditerranée (évidemment), mais aussi les recherches mélodiques d’un Nik Bärtsch (« When Then »), la mélancolie d’un Ibrahim Maalouf («Bela’s Dance ») ou d’Anouar Brahem (« Labyrinth »), les croisements entre musique classique traditionnelle et les improvisations du jazz (l’épique « Hinemoa’s Lament » qui atteint neuf minutes), entre le Nord et le Sud. Oui, la combinaison des trois instruments offre une palette sonore largement plus étendue qu’attendu. L’intention était louable, l’objectif ambitieux. Le résultat, à bien des égards, nous laisse sans voix. Avec ce « In Fading Light » éblouissant, Tania Giannouli mérite une large reconnaissance internationale, une place de choix sous les projecteurs…
Yves «JB» Tassin