Tomislav Goluban : 20 Years on the Road

Tomislav Goluban : 20 Years on the Road

Blue Heart Records ‐ Références catalogue : BHR 035

Le blues ne suscite plus guère de vocations parmi les jeunes des populations noires US et la vieille garde disparaît progressivement. La relève est ailleurs maintenant, de par le vaste monde… On découvre ainsi le Blues Maori de Nouvelle-Zélande (Grant Haua, De Layne), le Blues Voodoo Haïtien (Moonlight Benjamin), à côté de styles européens déjà bien implantés comme le Blues Serbe (Ana Popovic, …) ou le Blues Croate avec Vanja Sky, les Sunnysiders ou Tomislav « Little Pigeon » Goluban qui fait figure de vétéran, lui qui sillonne les Blues Highways depuis 20 ans aux USA et en Europe, de clubs en festivals. Il affiche quatorze albums au compteur. Homme-orchestre, Goluban porte un nombre effarant de casquettes : chanteur, compositeur, harmoniciste, band leader, radio D.J., éducateur, organisateur de festivals… Il est infatigable et, pour cette occasion, il a mis les petits plats dans les grands en organisant des séances live en studio avec trois orchestres différents, en Croatie et en Autriche, et en invitant huit chanteurs/-euses US et U.K. de renom dont Skylar Rogers, Malaya Blue, Kelly Zorbes, Greg Martinez, Teresa James, Crooked Eye Tommy, etc. Excusez du peu ! Neuf des quatorze faces sont des reprises de morceaux parus dans ses treize albums précédents mais avec une nouvelle orchestration et, surtout, la participation des guests. Sauf dans « I Love You Baby», son hommage chanté à Brownie McGhee (gt) et à Sonny Terry (hca) – son inspirateur et mentor – il se concentre sur son jeu d’harmonica, très efficace au demeurant. Tout du long, il laisse tous les autres vocaux à ses guests, ce qui donne d’excellents moments avec les chanteuses : Skylar Rogers (from Chicago) dans eux faces, un « Searchin’ for My Baby » amer mais plein d’entrain (…He done me wrong,…) avec bons passages de piano et harmonica, puis dans un bien enlevé «Forhill’s Boogie» et, aussi avec la Britannique Malaye Blue dans « Electric Lights », un beau blues en médium dont une partie des lyrics, d’après Goluban, a été empruntée à Robert Johnson; la Texane Teresa James fait fort elle aussi dans un « Speedin’ Train » en folie : ce n’est plus un train, c’est un TGV dont on souhaiterait être un passager. Sans oublier la californienne Kelly Zirbes dans « Everybody’s Fear », un plaidoyer bien senti en faveur de la paix, et dans « Hittin the Road Again » qui célèbre avec conviction une vie vagabonde. Les chanteurs ne sont pas en reste : avec Mark Cameron (+ gt) dans un « Party Time Blues » plein d’entrain, c’est une invitation sur le dance-floor avec de vibrants passages de guitare slide, piano, harmonica, avec Ryan Donahue et un «No Means No» une ballade d’actualité (…je ne veux pas d’ennuis, baby, …leave me alone…) et dans « Disappear For Good » sur rythme de rumba, voire Crooked Eye Tommy qui n’en peut plus dans un «I Can’t Take It No More» enlevé. À tout seigneur tout honneur, on mentionnera aussi les deux faces proposées par Goluban avec son Tobacco Road Blues Band : «Express Ride» qui ouvre joliment le bal, c’est un instrumental déjanté et fonceur suivi de « Blow Junkie Boogie », délirant lui aussi et qui atteste de l’addiction de Goluban au blues. Un album qui fera date en 2023 grâce à l’entregent et le talent de Goluban, à son panel exceptionnel de guests, et à un choix de morceaux au top.

Robert Sacre