Van Herck-Heylen-Thielemans, Cinema Paradisio

Van Herck-Heylen-Thielemans, Cinema Paradisio

Kurt Van Herck – Willem Heylen –

Eric Thielemans,

Cinema Paradisio

Oorwerk / News Distribution

Un trio sax-guitare –batterie fait immanquablement penser à celui formé par Joe Lovano, Bill Frisell et Paul Motian, un triangle équilatéral libertaire qui a multiplié les angles de lecture de dizaines de standards et de compositions personnelles parmi lesquelles nombre de pièces écrites par Paul Motian, le mythique batteur des sessions du Village Vanguard de Bill Evans. Au milieu des années nonante déjà, Kurt Van Herck et Eric Thielemans s’inspiraient de compositions de Motian lorsqu’ils se produisaient en duo à Anvers, avec aussi quelques standards propices à l’improvisation. Pour cet album à la fois pétillant et introverti, composé pour plus de la moitié de compositions de Paul Motian, le saxophoniste et le batteur se sont associés à Willem Heylen, jeune guitariste malinois de 25 ans dont le parcours jazzique l’a vu étudier avec Serge Lazarevitch ( Frisell n’était déjà pas loin), Jesse Van Ruller, Nelson Veras et Julian Lage. Sur deux compositions collectives et The Storyteller de Motian, on retrouve aussi le pianiste Jozef Dumoulin. Au ténor ou au soprano – sublime ambiance créée sur Yallah accompagné du bruitage constant de Thielemans et du flux sonore du guitariste -, Kurt Van Herck laisse entendre la pureté de son timbre sur les deux instruments. Remarquables aussi sont les trois pièces intitulées Negative Space dont la troisième d’inspiration indienne voit Kurt Van Herck jouer de la flûte traditionnelle indienne. Fiasco au tempo rapide est sans doute le thème le plus inspiré par le trio américain, avec les solos de guitare et ténor propulsés par l’énergie d’Eric Thielemans. Cinema Paradiso, musique d’Ennio Morricone pour le film de Giuseppe Tornatore avec l’inoubliable Philippe Noiret, clôture l’album avec une note sentimentale et inspirée où Willem Heylen nous touche dans un solo que n’aurait pas renié Julian Lage. A propos de cette musique, Bill Frisell écrit : « J’ai passé beaucoup de temps avec la musique de Paul Motian. Ça a été une joie d’entendre ces nouvelles versions de ses chansons que je connais si bien et que j’aime tant. Je sais que Paul aurait été heureux. » La musique du trio est en effet pleine d’amour et de reconnaissance. Un album à la fois nostalgique et résolument moderne.

Jean-Pierre Goffin