LG Jazz Collective, merci pour ces moments !

LG Jazz Collective, merci pour ces moments !

LG Jazz Collective, merci pour ces moments !

Vendredi 19 décembre, concert du LG Jazz Collective, au Centre Culturel « Les Chiroux » (Liège), à l’occasion de la sortie de « New Feel ».

 

Illustrations de Dominique Houcmant, AKA Goldo

Il est un peu plus tard que 20 h 30, dans une salle bondée, quand apparaît la section rythmique du LG Jazz Collective, emmenée par le maître de cérémonies de l’orchestre, le guitariste et compositeur Guillaume Vierset. On sent une fébrilité certaine émanant tant du public, sans doute impatient de découvrir le nouveau répertoire en « live direct », que de la part des musiciens pour lesquels cette soirée constitue l’aboutissement de longs mois de travail de répétitions et de gestion d’agendas. En effet, même si LG Jazz Collective est sans doute la formation la plus représentative de la génération montante du jazz belge, avec une moyenne d’âge autour de 25 ans, le groupe compte déjà plusieurs individualités fortes aux manettes d’autres projets musicaux.

Cette fébrilité ressentie devait sans aucun doute aussi beaucoup au fait que nous étions assis à côté de la copine du batteur de l’orchestre, Antoine Pierre. Ce dernier venait tout juste de rentrer de New York, où il réside depuis le mois d’août, dans le cadre d’une bourse d’études d’un an qui lui a permis de s’inscrire à The New School for Jazz and Contemporary Music. Jazzaround reviendra bientôt sur le sujet, et probablement sur ce rôle souvent sous-estimé des « chères moitiés » de jazzwomen et de jazzmen !

Antoine Pierre, « drummer of the band », au vu de son curriculum vitae, on mesure immédiatement l’ambition de cette nouvelle formation, entreprise par Guillaume Vierset. En fin de concert, ce dernier rappellera de façon pertinente que l’idée de créer le LG Jazz Collective avait été envisagée autour d’une table de la brasserie Le Bouquin, cet estaminet bien connu au Pays de Liège, et situé juste au-dessus de la salle de spectacles de ce soir ! Igloo Records ne pouvait donc pas mieux choisir pour un concert de lancement. Au-delà du casting, Guillaume Vierset assure aussi l’ensemble des arrangements et signe plusieurs compositions de « New Feel ». Le pianiste du groupe est Igor Gehenot, auteur de deux cédés, et déjà parmi les meilleures ventes du jazz belge. Son trio s’est déjà produit un peu partout en Europe et en Amérique Latine. Le dernier maillon de la rythmique est le bassiste Félix Zurstrassen, d’un naturel placide, il assure par un jeu précis, sans fioritures, équilibrant ainsi  l’extraversion d’Antoine Pierre. Enfin, le septet compte aussi trois souffleurs : Jean-Paul Estiévenart qui, avec Bert Joris, côté Flamand, est un de nos meilleurs trompettistes, Laurent Barbier au saxophone, dont le jeu a explosé en moins de deux ans, et un second saxophoniste, Steven Delannoye, sans doute, le seul dont la genèse ne doit rien à la Meuse. En plus, avec ses 31 ans, il est le Nestor du groupe ! Cela dit, ces deux saxophonistes se complètent merveilleusement tant sur le plan stylistique qu’au niveau du registre sonore, surtout quand Delannoye se libère au saxophone soprano.

Comme sur l’album, le concert s’ouvre sur une composition de Guillaume Vierset, Grace Moment, une ballade autour d’un séduisant noyau mélodique, mais où la succession de solos des membres de l’orchestre va rapidement apparaître un peu poussive. Le stress s’est sans aucun doute emparé du groupe et le « down tempo » n’est pas la meilleure façon de s’en libérer. Dès le deuxième titre, Jazz @ The Olympics, une composition de Nathalie Loriers, le train prend sa vitesse de croisière, les regards que s’échangent les musiciens traduisent un relâchement bénéfique, sans doute aussi grâce au jeu volubile et provocant du batteur qui donnera quelquefois l’impression de se sentir à l’étroit. Move, une autre composition de Vierset va définitivement installer le rapport entre la scène et le public : comme une conviction collective de vivre le début d’une grande histoire. En effet, au fil de l’interprétation des autres titres de « New Feel » (The End Is Alway Sad, Toscane de Philip Catherine, New Feel, Carmignano d’Eric Legnini, Dolce Divertimento du guitariste Alain Pierre…), LG Jazz Collective fera la démonstration qu’il existe bien une alternative au rituel des solos successifs. Ici et là, le groupe laissait émerger un noyau – un trio ou un quartet – pour entreprendre la partie improvisée, atteignant parfois même une intensité proche de la transe. On soulignera ici un des moments les plus puissants du concert, quand la rythmique a soutenu Jean-Paul Estiévenart dans un solo époustouflant suite à l’exposé de A, une composition de Lionel Beuvens. Il y aura aussi cet échange magistral, en forme d’appels/réponses entre guitare et batterie, sans oublier le lyrisme délicat de Nick D., un très bel hommage à Nick Drake, composé par Vierset, auquel ne manquaient plus que des paroles et une voix pour les chanter !

Bien entendu, nous étions en bord de Meuse, et pour une grande part d’entre eux, les membres du LG Jazz Collective sont des enfants du Pays de Liège, mais ceci n’explique pas les raisons pour lesquelles le public va les rappeler à trois reprises. La soirée se terminera par une autre composition de Guillaume Vierset, Positive Mind. Voilà sept musiciens de jazz pour qui 2015 s’annonce de manière positive, avec un premier rendez-vous à Bruxelles, au Théâtre Marni, le 14 janvier prochain.

Philippe Schoonbrood

Nota Bene

Peu de mots pour parler d’Igor Gehenot, si ce n’est pour saluer son professionnalisme, mais aussi son courage, en acceptant de jouer sur un piano qui n’a plus sa place ni dans un centre culturel, ni dans le moindre club de jazz d’ailleurs. En effet, le piano de ma grand-mère (un modèle droit de la marque Caps) sonnait mieux, même en plein milieu du mois de décembre. Igor a merveilleusement contourné la difficulté en traitant l’instrument avant tout sur le plan rythmique, aidé en cela par un ingénieur du son qui de son côté a su couvrir ce point noir d’un léger voile.