Pépites #38, Around Jazz
Around Jazz, quelques pépites…
C’est du jazz… mais pas tout à fait non plus. Voici une collection de disques qui méritent qu’on leur rétrocède une oreille très attentive.
Black Flower, Future Flora
Entre Anvers et Gand, quelques kilomètres à peine. Ceux qui ont vu naître Black Flower, l’un des groupes européens les plus excitants du moment. Néanmoins, le quintet ne s’est fermé aucune frontière. L’Orient, les Balkans, l’Afrique du Nord et bien évidemment de l’Ouest (particulièrement l’Éthiopie, berceau spirituel du Rastafarisme), chaque coin de la planète est source d’inspiration et prétexte au voyage. Inspirant comme ces plantes, ces « mauvaises herbes » qui poussent courageusement à même le béton de nos cités… « Future Flora », une métaphore qui exprime une volonté de nourrir nos pensées les plus révolutionnaires en arrosant ces plantes indésirables mais, comme toute plante, indispensables à notre survie. Ce troisième album de Black Flower, on l’attendait avec impatience. « Artifacts » plus particulièrement nous avait tous ouvert les yeux (et les oreilles) sur le potentiel d’un groupe dont la carrière devait décoller. « Future Flora » confirme et accentue : plus puissant, plus réfléchi encore, plus éclairé que les deux premiers opus. Le sujet est sans doute grave, mais ce jazz hybride au groove irrésistible pose un baume sur les plaies de notre monde. Assurément l’un des albums « around » de l’année ! Black Flower en concert le 17 mai, au Handelsbeurs (Gand), le 23 mai à l’Arenbergschouwburg d’Anvers, le 25 mai au RSL Jazz Festival (Roulers) et le 8 juin au Wereldfeest de Louvain.
RYMDEN, Reflections & Odysseys
Au mitan des nineties, l’un et l’autre ont œuvré au succès d’un jazz scandinave conquérant et inspirant, sans être viking. Tandis qu’Esbjörn Svensson posait les fondements d’un jazz « nouveau » en alliant la puissance du rock, la mélancolie néo-classique et les improvisations, Bugge Wesseltoft imposait de son côté sa « New Conception of Jazz » et le Nu Jazz (pour New Urban Jazz), développés autour de son label Jazzland Records. Beaucoup de musiciens actuels (parfois sans le savoir) leur doivent leur « son ». Qu’aujourd’hui, le pianiste norvégien s’associe à la rythmique survivante de E.S.T. (Dan Berglund et Magnus Öström) n’a rien d’étonnant et n’est surtout pas critiquable. Mieux : on en rêvait ! Pour quel résultat ? L’association momentanée (ou pas…) RYMDEN est-elle un mixage équilibré des deux mouvements évoqués plus haut ? En vérité, non… Plus particulièrement lors des plages acoustiques (soit une grosse majorité de l’album), « Reflections & Odysseys » se situe nettement plus à l’E.S.T. qu’au Nu… Ce qui nous permet de prendre conscience à quel point l’assise rythmique qui soutenait Esbjörn Svensson a joué un rôle essentiel pour le renouveau du jazz. Une rythmique implacable, lourde et quasiment rockeuse. « Reflections & Odysseys » est un album élégant, passionnant, moderne dans le bon sens du terme. Un album (et oui…) résurrectionnel qui n’aurait sans doute pas existé sans ce stupide accident de plongée qui a ôté la vie d’ Esbjörn Svensson, dont le fantôme plane toujours aussi haut dans nos pensées et nos cœurs… A découvrir au Festival International Mithra Jazz à Liège ce vendredi 17 mai (salle du reflektor).
Duane Serah, Dying Under Lights
Petite séance de rattrapage pour cet album disponible en vinyle (si il en reste quelques-uns encore en stock) ou en téléchargement depuis huit mois… Mais quand on aime, on ne compte pas les mois perdus. Si je vous en parle de « Dying Under Lights » aujourd’hui, c’est qu’il existe un intérêt à le faire. Celui de la découverte d’un « projet » ou « groupe » liégeois friand d’atmosphères planantes. Et ça nous convient très bien en cette période de grands froids. Duane Serah serait, selon la description Bandcamp, « (un groupe qui) génère des ondes déformées, dont les touches rosâtres plongent l’auditeur dans un halo mystérieux »… ?! Ou la façon poétique de vous décrire un mur sonore qui se dresse devant vous comme le Chemin des Chapelles devant les coureurs de la Flèche wallonne. C’est imposant, avec de gros morceaux de mélodies hallucinantes dedans. Duane Serah plaira également aux fans nostalgiques de Cocteau Twins et de My Bloody Valentine.
Joseph « YT » Boulier