Pépites #49, Around Jazz
Around Jazz, quelques pépites…
C’est du jazz… mais pas tout à fait non plus. Voici une collection de disques qui méritent qu’on leur rétrocède une oreille très attentive.
Stubbleman,
Mountains and Plains
Pascal Gabriel fendait les routes des States, d’Est en Ouest, de New York aux faubourgs de la Ville des Anges. Traversant zones désertiques ou mégalopoles saturées en un road trip de deux mois et demi… Dix semaines de réflexions personnelles sans doute ? Il a certainement repensé à ses années adolescentes passées au sein du groupe punk The Razors, quand il hurlait sa haine à la gueule de la bourgeoise namuroise. A quoi bon ?! Qui écoute sur Terre ce qu’un Martien souhaite lui dire ? Alors il a pris le chemin de l’exil… Pas très loin en vérité : Londres, où les punks commençaient à céder le relais aux groupes de cold wave ou de new wave (avec ou sans machines). Plus tard, toujours à Londres, il sera impliqué dans la confection de deux énormes tubes pour le compte de l’acid house qui encombre peu à peu les charts anglais. A défaut de lui rapporter de la tune, ces hits lui offrent la reconnaissance du milieu… Les Dieux de la pop le réclament pour produire ou composer des tubes, de Kylie Minogue à New Order, en passant par Miss Kittin et tant d’autres ! Par monts et par vaux, armé d’un enregistreur numérique et d’une caméra, Pascal Gabriel pense à tout cela… Il pose ainsi les fondements d’un album concept qui réunira onze cartes postales sonores gribouillées au bord de la route, à des années lumières de tous ces styles musicaux. Des compositions néo-classiques (le piano et les synthétiseurs modulaires occupent une place de choix) où s’engouffrent une pointe de nostalgie et beaucoup d’humanité. Enormément d’humanité ! En voyant son visage de bourlingueur dans la glace du rétroviseur, Pascal Gabriel a souri : « le Stubbleman » ! L’homme mal rasé, dont le carnet de route doit encore nous offrir les plus beaux chapitres.
Quiet Men,
Quiet Men
Au sein de la formation Quiet Men, on trouve un guitariste (Julien Omé). Mais aussi, ce qui est franchement moins habituel, Pablo Cueco, un joueur de zarb (un tambour originaire d’Iran) et Simon Drappier à l’arpeggione (imaginez le croisement entre une guitare et un violoncelle). Ajoutez la clarinette basse de Denis Colin, dont les sonorités sont proches de celles d’un duduk… Cet assemblage singulier donne à la musique du quartet un petit air de folk exotique. Evitons néanmoins les raccourcis faciles : Quiet Men n’a rien d’un vrai faux disque de musique du monde… Les compositions (quasiment toutes signées par les membres du groupe) dépassent largement ce carcan-là. Ici, de magnifiques ballades côtoient un répertoire aux allures de free jazz. Chez ces hommes tranquilles (un patronyme inspiré du bar où ils se rencontrent), on ne pratique pas la simple exploration de beaux paysages… On scrute les champs du possible à la recherche de textures et de sentiments inédits.
Théo Girard,
Pensées rotatives EP
« Pensées rotatives (Live at Le Comptoir ») » est une courte parenthèse que le contrebassiste Théo Girard s’autorise, entre deux projets de plus longue haleine… Une suite au « 30Years From » enregistré en trio (basse/ batteri/trompette), paru il y a deux ans, et un préambule à une « Bulle » à venir, pour laquelle il modifiera légèrement la configuration de son entourage. Une parenthèse entre un album bilan de trente années de carrière et les nouvelles perspectives qui s’offrent au (désormais) quartet, auquel on souhaite le meilleur dans les sphères du jazz-punk-free… Dans l’attente, le trio s’amuse des codes en dialoguant avec une section de vents dont la disposition géographique oblige le public à effectuer des mouvements rotatifs… Cool !
Joseph « YT » Boulier