Igor Gehenot, jazz en confinement

Igor Gehenot, jazz en confinement

Igor Gehenot:

la vie du jazz en temps de confinement.

Après avoir enregistré “Delta”, en 2017, en compagnie du bugliste français Alex Tassel, du contrebassiste suédois Viktor Nyberg et du batteur luxembourgeois Jérome Klein, Igor Gehenot vient de sortir, toujours chez Igloo, l’album “Cursiv” gravé cette fois en quintet, avec David El Malek, saxophoniste ténor français qui a côtoyé les pianistes Baptiste Trotignon et Pierre de Bethmann. En pleine période de promotion, le pianiste liégeois explique comment il s’adapte à cette période de confinement : la vie du jazz se poursuit. Comment acquérir ses disques ? Quelles vidéos sont disponibles ?

Propos recueillis par Claude Loxhay

Tu as sorti l’album Cursiv en février. Tu étais en pleine promotion quand a commencé le confinement…

Oui, on a pu présenter les premiers concerts, comme celui à Bozar ou à Mazy, mais on a dû faire l’impasse sur Eupen et Dinant. Le concert de Jazz à Liège est reporté en septembre. Rien n’est encore décidé pour la sortie de l’album en France, avec un concert à Paris qui était initialement prévu en avril.

Comment vis-tu ce confinement ?

Pas mal, j’en profite pour pratiquer mon instrument. Evidemment, la situation n’est pas facile. Je voudrais voir mes amis, assister à des concerts. Mais j’essaye d’être solidaire en espérant que la levée du confinement se fasse le plus rapidement possible mais en toute sécurité.

Les disquaires ont fermé leurs portes mais on peut toujours acheter tes disques…

Oui, par l’intermédiaire de mon site ou de celui du label Igloo. On peut aussi passer par toutes les plateformes existantes de streaming. C’est heureux de disposer d’internet pour maintenir ce contact, pour que la musique continue à exister.

Il n’y a plus de concert, mais on peut te découvrir en vidéo…

Oui, on peut découvrir “Cursiv” sur You Tube et puis l’intégralité du concert à Bozar, pour lequel Antoine Pierre remplaçait Jérôme Klein : c’est une vraie chance. Il y a aussi une vidéo du quartet captée à l’Eurojazz de Mexico. Par ailleurs, j’ai enregistré récemment un solo live en streaming à Bozar, une expérience nouvelle pour moi, de jouer sans la présence du public.

A l’époque de la sortie de “Delta”, tu avais expliqué, lors d’une interview, ce qui t’avait incité à passer du trio au quartet…

J’avais envie d’avoir la sonorité d’un bugle. Je m’étais renseigné. Alex Tassel présentait le profil idéal, c’était un choix naturel et logique. Par l’intermédiaire de Daniel Romeo, j’ai pu le contacter. Il a tout de suite accepté. Il est devenu un vrai ami, un vrai acolyte musical en cette période de 4 ans.

Pour passer au quintet, c’était important de garder les mêmes musiciens à la base ?

Evidemment, après une cinquantaine de concerts, une vraie connexion s’est établie entre nous quatre: c’est un vrai groupe, pas un one shot. Chacun a son rôle dans cette musique qui se crée ensemble. En plus, humainement, la complicité existe aussi. J’aime travailler sur le long terme, ce que le label Igloo me donne la chance de réaliser.

Pour passer au quintet, comment le choix s’est-il porté sur David El Malek ?

Je cherchais un saxophoniste ténor. C’est Alex qui m’a mis sur la voie de David, il joue avec lui dans le quartet de Diego Imbert. Je cherchais un profil esthétique un peu nordique mais avec la flamme du jazz new yorkais. Je voulais un spectre sonore proche du hard bop, de la musique d’Art Blakey. Je connaissais l’album qu’il a enregistré avec Baptiste Trotignon au piano, Darryl Hall à la contrebasse et Dré Pallemaerts à la batterie. Il a aussi enregistré avec d’autres pianistes, comme Pierre de Bethmann. David a déchiffré les partitions très rapidement et on a pu très vite faire des concerts. Sa présence implique évidemment un changement de construction des thèmes, un autre dispaching des solos. Je suis content de ce qu’il apporte à la musique, il apporte un nouveau spectre sonore qui se rapproche des quintets du hard bop.

Pour “Cursiv”, tu as écrit de nouvelles compositions. Comment composes-tu ?

Je pars d’une mélodie assez simple, mais riche harmoniquement puis, tout se construit en amont : en studio, il y a une part d’improvisation, chacun donne son avis et puis je tranche mais toujours à partir des suggestions de chacun, de manière démocratique. Autour d’un fil conducteur, on dispose d’un panel de tempos, entre tempos enlevés comme pour Fat Cat et ballades, ensuite on cherche à trouver une grande cohérence harmonique. J’aime avoir un fil conducteur et garder une certaine cohérence.

L’album comprend aussi deux thèmes d’Alex…

Oui, Yai et puis The Faith : en fait, c’est moi qui ai choisi ce titre. Après un premier jour en studio, Alex a composé cette mélodie, sans avoir pensé à un titre précis. On a immédiatement adopté cette composition et j’ai suggéré ce titre qui n’a pas de référence religieuse mais est inspiré par la confiance mutuelle qui existe entre nous, sur un équilibre naturel qui existe au sein du groupe.

Qui a choisi de reprendre I remember Clifford de Benny Golson ?

C’est moi, la mélodie convenait parfaitement à la sonorité feutrée d’Alex.

L’album propose deux versions du thème Julia…

Oui, une version studio en quartet et une live en quintet, ce qui a débouché sur un clip.

En parallèle à “Cursiv”, tu participes au nouveau projet du guitariste Fabrizio Graceffa…

Oui, c’est un chouette projet, une musique à lui dans laquelle je me sens à l’aise. Il y a un projet d’album, “Gardens”, mais il faudra prévoir d’autres dates pour les concerts.

 

A écouter

Igor Gehenot, Road story (trio), Igloo 2012

Motion (trio), Igloo 2014

Delta (quartet), Igloo 2017

Cursiv (quintet), Igloo 2020

Alex Tassel, Serenity (Moods 2015), avec Laurent De Wilde et Sylvain Beuf

Electric Excentric, (Such 2012), avec Manu Codjia

Past and Present/A quiet place (Les Belougas 2019), avec Rick Margitza, Jason Rebello, Manu Katché

David El Malek, Baptiste Trotignon-David El Malek, Naïve 2005.

Organza (Cristal 2000), avec Pierre de Bethmann

Talking Cure (Cristal 2002), avec Pierre de Bethmann

Colors (Such 2015), quartet de Diego Imbert, avec Alex Tassel.

Vidéos sur You Tube

Igor Gehenot: extrait Cursiv, avec J. Klein

concert au Bozar, Cursiv, avec Antoine Pierre

Delta à l’Eurojazz de Mexico

Alex Tassel: A quiet place, avec Manu Katché

Duc des Lombards, avec Sylvain Beuf

My funny Valentine, avec Rick Margitza

David El Malek: Quartet de Diego Imbert, avec Alex Tassel

Sax Summit, avec les frères Belmondo

al Sasso-Belmondo Big Band, A love supreme.