Pépites #80, Around Jazz

Pépites #80, Around Jazz

Around Jazz, quelques pépites…

C’est du jazz… mais pas tout à fait non plus.

Voici une collection de disques qui méritent qu’on leur rétrocède une oreille très attentive.

Tony Allen & Hugh Masekela,

Rejoice 

WORLD CIRCUIT

« Rejoice », pour une réunion au sommet des Afriques. L’Afrique de l’Ouest, le Nigéria, avec le batteur Tony Allen, « le plus grand de tous… » (dixit Brian Eno). Un lieutenant de Fela Kuti dont il était aussi le directeur artistique. Puis l’Afrique du Sud, où s’est éteint le trompettiste Hugh Masekela il y a deux ans. Lui qui fut un temps le mari de Miriam Makeba et dont la chanson « Bring Him Back Home » est considérée comme un hymne essentiel à la libération de Nelson Mandela. Un musicien très actif dans le groupe de Paul Simon, qui participa activement au succès planétaire d’un précurseur de la World Music moderne « Graceland ». Les deux hommes sont las de se croiser furtivement durant les tournées, sans jamais prendre le temps de se poser tous les deux. Juste un peu de temps, pour jouer de la musique ensemble… Ils en auront enfin l’occasion il y a dix ans… Quelques titres enregistrés à la dérobée dans un studio londonien, en profitant d’un alignement des étoiles et d’une concordance des agendas. Des sessions à achever, dont Tony Allen retrouvera les bandes quelques mois après le décès de son ami… La suite se savoure en beaux pointillés. Les temps ont changé, mais pas la pureté du jeu du duo. La musique est là, intacte, comme son esprit qu’ont su préserver respectueusement les musiciens de la nouvelle génération qui ont appuyé Tony Allen dans cette tâche. On pense à Joe Armon-Jones, le claviériste de l’Ezra Collective ou au bassiste Mutale Chashi. Le résultat est puissant, vibrant. Rarement l’âme d’un musicien n’aura été aussi présente sur disque. Tony Allen avait prévu de jouer l’album lors de festivals à venir, avec un groupe spécialement assemblé pour l’occasion… Fichu virus ! Un entretien avecc Tony Allen, réalisé par Jean-Pierre Goffin, sera en ligne le 06 mai prochain.

Stein Urheim,

Downhill Uplift

HUBRO RECORDS

Jazzland, Rune Grammofon et Hubro… Avec de telles références en matière de publication, Stein Urheim devait sans aucun doute trouver sa place dans les « pépites ». Chose faite d’ailleurs il y a deux ans déjà, lorsqu’il nous avait proposé les « Utopian Tales » écrits en compagnie du Cosmolodic Orchestra. Pour ce sixième album enregistré pour le compte du label au petit hibou, le guitariste / chanteur norvégien a formé expressément le Fenomenolodic 4 qui comprend également deux multi-percussionnistes et un contrebassiste connus pour leur résistance aux variations climatiques. En ouverture, des atmosphères planantes… Puis changement de cap (il faudra s’y faire) : une bifurcation vers l’Inde. Plus loin, un peu d’Americana, un peu de folk-rock ou de jazz fusionné. Et une reprise du « Poor Moon » de Canned Heat… A l’arrivée, de façon surprenante, un disque cohérent. A vrai dire, on s’attendait un peu à ces bouleversements. La pochette surréaliste de « Downhill Uplift » nous avait mis la puce à l’oreille !
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Chrones,

Mental Climbers 

ART DISTRIC MUSIC

Les quatre Parisiens de Chrones (avec le « N » à l’envers, mais j’ai pas trouvé sur mon clavier…) revendiquent une appartenance au mouvement Jazz Grunge et un attachement indéfectible aux jeux vidéos… Cf. le titre inaugural « Invincible Star » qui vous plonge dans l’univers décalé de l’emblématique Super Mario… Ils ont par ailleurs emprunté leur nom aux créatures mystérieuses qu’Alain Damasio a introduites dans son roman « La Horde du Contrevent ». Voici le décor planté, les intentions dévoilées. Même en creusant un peu, nous ne retrouverons dans la musique du quatuor, ni le désespoir de Kurt Cobain ni la surpuissance de Thurston Moore. Sans doute n’était-ce pas l’objectif. Par contre, Chrones fait preuve d’audace. Les compositions hétéroclites que le groupe nous propose mêlent (finalement) assez harmonieusement jazz et rock, avec une petite touche électro-expérimentale. Pour un premier essai, ce « Mental Climbers » fougueux laisse entrevoir un avenir plutôt intéressant…

 

Joseph « YT » Boulier