Energie Noire : Disclosed Motions
Onze Heures Onze / Xango Music Distribution
Après avoir accueilli d’autres musiciens en tant qu’invités sur leurs deux premiers albums, voici venir un nouveau disque épuré pour ce duo français dont la composition est, me semble-t-il, inédite. Formé du saxophoniste alto Nicolas Péoc’h et du bidouilleur Vincent Raude qui, outre les machines et les programmations, distille aussi quelques notes de guitare et mixe le tout, Energie Noire propose un jazz électro d’une belle liberté. Aux deux premières écoutes nous distinguons une musique faite d’improvisations, de souffles, de bruits, d’ambiances lugubres, mystérieuses. Les écoutes suivantes nous laissent percevoir d’autres choses : nous réalisons, en fixant notre attention, que ceci est très cohérent, bien pensé. Le sax déroule un semblant de mélodie, de la chaleur, développe des lignes caressantes tandis que les machines projettent des rythmiques, certes légèrement à contre-courant du jazz, qui s’inspirent d’une techno camouflée, de la trance mise en sourdine, de la lounge, de la répétition. Atypique certes, mais cette musique a été imaginée, pensée avec la présence de la retenue et du calme au sein des morceaux. Quelquefois le duo s’anime mais il redevient placide dans la minute suivante. C’est intrigant, débonnaire parfois, faussement désordonné, âpre et sinueux mais il faut aussi être apte à y détecter la subtilité et la parfaite maîtrise des instruments et surtout admettre que ce duo possède les aptitudes à se créer un univers singulier. Cette démarche originale prouve aussi que la sobriété et l’impro peuvent intégrer le free jazz d’un sax qui évite d’être bruitiste. Déconcertant puis prenant seront les adjectifs qui me semblent le mieux correspondre aux écoutes successives des neuf titres de cet album.