Mark Lockheart : Dreamers
Ce qu’on apprécie chez Mark Lockheart, c’est la facilité avec laquelle il parvient à se fondre dans l’univers musical qui l’entoure. Véritable sax-caméléon, il peut changer d’aspect pour s’intégrer dans les milieux aussi hostiles qu’accueillants. Et on peut remonter loin… Déjà à l’époque où il intègre le Loose Tubes (cinq albums enregistrés dans les années quatre-vingts), un groupe de jazz influent pour la renaissance du jazz britannique et qui lui permet de se faire connaître auprès de vedettes du milieu pop/rock pour lesquelles il devient un musicien de session dès les années nonante (Jah Wobble, Radiohead, Stereolab, les High Llamas, …). A l’exception d’une escapade dans le milieu classique (« Salvator Mundi » où il confronte son saxophone aux offrandes de musiques religieuses), c’est toujours vers le jazz qu’il retourne : en quintet au sein du Polar Bear, en trio avec Malija (avec la paire rythmique Jasper Hoiby / Liam Noble) ou en formation très élargie (« Days on Earth », enregistré en sextet renforcé par un orchestre de trente musiciens…). Bref, insaisissable !
Pour ce nouvel opus subtilement intitulé « Dreamers », Lockheart s’est offert des libertés : « Ma seule intention était de ne pas être limité par un style ou un genre. » Dont acte… Nous partirons à la découvertes de nouveaux sons, sur des schémas electro-pop (on pourrait presque penser à Kraftwerk) ou free… Il n’y aura aucune barrière contraignante. Et avec le trident qui l’accompagne, le saxophoniste est servi ! Aux claviers, avec un rôle prépondérant, on retrouve un pilier du label Edition : Elliot Galvin (notamment membre de Dinosaur). Pour la section rythmique, Lockheart a porté son choix sur la paire Tom Herbert (lui aussi membre de Polar Bears) / Dave Smith (Loop Collective, Fofoulah).
Avec ces paramètres-là, « Dreamers » est bien entendu un album désarçonnant, dans le bon sens du terme. Il étonne et détonne… On en attendait pas moins d’un Mark Lockheart, constamment en rupture avec son passé.