Ensemble Basiani à l’OPRL (17/11/23)
Dans les notes accompagnant « Lament », un disque sur l’exil et le lointain du temps, le compositeur géorgien Giya Kancheli commentait à l’endroit de la musique de son pays : « Le côté mystérieux de la musique populaire et polyphonique de Géorgie me fascine, sans que je puisse vraiment le comprendre ». Nous pourrions faire nôtre cette impression à l’écoute de l’Ensemble Basiani tant la sienne captive tout en demeurant énigmatique. Et probablement est-elle plus encore insaisissable à nos oreilles peu habituées à entendre la langue géorgienne… Pourtant, nul besoin de comprendre le sens de ces paroles ou d’être amateur de musique ancienne pour l’apprécier tant l’Ensemble Basiani porte en lui l’universalité de sa démarche et l’humanité de son propos.
Ce chœur de quinze hommes perpétue une tradition ancienne dont les origines remontent à plus de mille ans. Chants du labeur, chants de rites, chants d’apaisement, ils ont toujours été ancrés dans la vie sociale et religieuse de la Géorgie, un des premiers pays à avoir adopté la religion chrétienne. Un patrimoine qui reste vivace aujourd’hui dans certaines régions du pays, au point d’avoir été reconnu par l’UNESCO. Le nom Basiani renvoie d’ailleurs à une contrée de Géorgie comprise dans l’actuelle Turquie.
La polyphonie est un art précieux qui ne cesse de nous interpeller. On ne connaît à vrai dire pas grand-chose de ses débuts. Comment composaient ceux qui la pratiquaient ? Comment faisaient-ils pour s’assurer de la transmission des œuvres ? Comment ces chants ont-ils survécu au-delà du lointain ? Ce soir au Philharmonique de Liège, leur restitution était époustouflante, dans tous les sens du terme. La voix chantée comme lumière, comme signe indéfectible de l’humanisme conjurant les abnégations mortifères qui hantent l’actualité. Après un passage à Berkeley, au Lincoln Center de New York, au Concertgebouw de Bruges, Basiani a assuré une prestation sans temps mort, sans flottement, sans relâchement. L’accueil réservé par le public liégeois était à la hauteur du credo de ce combo vocal hors pair.
Merci à Dominique « Goldo » Houcmant pour les photos.