ÄKÄ : Free Voices of the Forest
Cet album, enregistré en public en France en 2022/23 lors d’une tournée d’une trentaine de dates, est le résultat d’une rencontre, effectuée quelques années auparavant, entre les pygmées ÄKÄ de l’ensemble NDIMA (La forêt), habitants de la forêt équatoriale du Congo-Brazzaville et trois musiciens français occitans. Le tout placé sous la direction artistique de Sorel Eta, ethnologue et défenseur de la cause des populations autochtones. Ce qui caractérise cette musique est évidemment le choc entre deux cultures radicalement opposées, mais qui parviennent à se compléter et, par intermittence, à bien fusionner. D’un côté, il y a le chant (et les danses en live) des pygmées qui est caractérisé par un aspect répétitif, envoûtant et il est soutenu par des percussions minimalistes, des sifflements et des mains claquées. Ces voix sont aussi surprenantes dans le sens où elles délivrent une polyphonie qui inclut une forme de yodel et de brusques changements de registre. Ces chants sont influencés par les bruits de la nature qui entourent ce peuple au quotidien comme les chants d’oiseaux et les cris d’animaux. Le soutien musical, apporté par deux cultures aux antipodes, se résume donc à peu de choses : deux sortes de harpe, un arc musical, une flûte, un clavier, quelques effets créés par les Français et des percussions ethniques. Pendant près d’une heure, vous allez vous être immergé dans le monde d’une tribu dont les chants millénaires pourraient s’éteindre vu le manque d’intérêt porté à cette coutume par leurs enfants. Et d’un autre côté, il y a, minoritairement, cette fusion avec les chants traditionnels occitans également singuliers. Le concert se termine par une chanson surprenante (« People From the Trees ») où tout fusionne : voix, percussions, un brin de pop et de jazz, des effets et même un passage rappé, saccadé ! Considérons cet album comme le témoignage d’une belle rencontre entre deux mondes et la trace qu’elle nous laisse au travers de cette nouvelle fusion de sons. Mais il est surtout la déposition d’un chant original, hélas, en train de s’éteindre. Le livret, en français et anglais, nous apporte d’utiles informations sur la genèse du projet, sur les pygmées ÄKÄ et leur sombre avenir. En attendant, ici est sauvé ce qui pouvait l’être. Une tradition vocale.