Ternoy, Cruz, Orins : The Theory Of Constraints
La contrainte ne se résume pas à une figure de style. En art, elle est parfois un procédé à part entière. En érotisme aussi, mais ça, c’est une autre histoire. En conférant à leur album un titre volontairement docte, « The Theory Of Constraints », Jérémie Ternoy, Ivann Cruz et Peter Orins ne jouent pas la carte de l’esbroufe, ils reviennent sur un concept qui leur tient à cœur depuis longtemps. Leur premier album, signé sous le nom de TOC (Ternoy-Orins-Cruz) en portait déjà l’acronyme. Cette théorie des contraintes, que l’on rencontre dans le monde du management et de la gestion des organisations part du postulat que le déséquilibre est inévitable, mais aussi souhaitable. Peut-être faut-il voir dans cette idée l’incarnation d’une méthode que le trio tend à appliquer à sa démarche : identifier la contrainte; exploiter la contrainte; subordonner tous les processus au processus contraint; élever la performance de la contrainte si nécessaire; recommencer à l’étape 1. Un lexique qui ressemble à une feuille de route en entreprise pour améliorer les voies de sa gestion interne… Plus prosaïquement, cet album constitue peut-être un exercice grandeur nature d’essais et d’erreurs, de tâtonnements, et parfois d’errances. Des débuts de lignes harmoniques surgissent, parfois elles reviennent à leur point de départ, parfois elles ne le quittent jamais, parfois elles nous font perdre le cours de l’écoute, parfois elles nous contraignent à nous concentrer pour ne pas en perdre le fil. Entre les caresses de peaux et les bruissements percussifs d’Orins, les notes démembrées de piano de Ternoy et les cordes titillées ou pincées de Cruz, tout est somme toute affaire d’équilibre. Et celui-ci ne s’atteint véritablement qu’après annulation des contraintes dont chaque musicien s’est joué.