
Ronan Courty : Synesthesia
Ce n’est qu’indirectement que nous avions évoqué, au printemps dernier, les agissements de Ronan Courty à l’occasion de son travail au sein du collectif No Tongues se situant entre jazz, néo-classique et musique expérimentale. Contrebassiste inventif et atypique établi à Nantes, Courty présente sa démarche instrumentale comme étant « concentrée autour du timbre et de la pulsation au service de la création d’esthétiques originales ». Au-delà des mots, c’est effectivement un travail acoustique singulier qu’il propose. En solitaire, Courty se risque sur les routes d’une musique bien plus introspective, une musique qui se suffit amplement à elle-même mais dont on imagine très bien qu’elle pourrait servir de support idéal à un film muet, à une chorégraphie ou à un acte de résistance saboteur. Cet album aligne deux longues pièces de durée égale de dix-huit minutes. Sur la première, « Synesthesia », Courty recourt à une technique basée sur le frottement répétitif, pour ne pas dire obsessif, des cordes de sa contrebasse. Assez rapidement, on perçoit les nuances harmoniques subtiles qui s’en dégagent. Sur la seconde, « Ideasthesia », Courty appuie son travail des cordes par un synthétiseur, des manipulations sur des verres à moutarde et des diapasons. Le morceau reste dans la même veine que le précédent, comme s’il en était la continuation naturelle, mais ses sonorités diffèrent quelque peu et lui confèrent une dimension plus énigmatique encore. Enregistré dans une chapelle très réverbérée en une prise, ce disque apparaît comme une épiphanie en ce début d’année. Ronan, si tu nous lis quelque part, sache que tu es le bienvenu à Liège pour un concert !