Le dossier Intervalles du mois – novembre : Démystifier le jazz… 2) Les jazzmen dépassent les limites.
En partenariat avec radio Équinoxe FM (105.0 à Liège et en streaming), JazzMania vous proposera tous les mois un dossier musical spécifique. Chaque mois, un thème, toujours choisi sous le signe de la (re)découverte, en mots et en sons.
Comment démystifier le jazz ? Comment faire en sorte que certains d’entre vous abordent ce genre musical sans ressentir cette fâcheuse impression d’en être exclu ? C’est la mission que l’on se donne dans un feuilleton de quatre épisodes. Souvenez-vous, il y a un mois, nous avons consacré une heure aux musiciens catalogués « rock » mais qui ont franchi à certains moments de leur carrière la ligne bleue du jazz (jazzmania.be – Dossier du mois d’Octobre). Cette fois, nous effectuons le chemin inverse… Nous allons nous intéresser aux jazzmen qui soit ont joué à la limite du jazz et d’autres genres, soit ont clairement influencé les musiciens de rock.
1) Robert Wyatt : Shipbuilding (« EPs ») – Domino
On démarrait avec un vrai aficionado du jazz, ex-membre du Soft Machine, Robert Wyatt, interprétant ici une magnifique ballade pop que l’on doit à un chanteur / compositeur associé à ses débuts à la scène punk-rock, Elvis Costello.
2) John Coltrane : A Love Supreme part. 1 Acknowledgement (« A Love Supreme ») – Impulse !
Il y aura de grands noms du jazz dans cet épisode. John Coltrane à l’instant, son album légendaire paru en 1965 « A Love Supreme ». Pourquoi celui-ci en particulier ? D’abord, parce qu’il s’agit d’un album essentiel du répertoire du jazz, puis aussi parce que « Love Supreme » par ses textures sonores et les solos de Coltrane, a influencé de façon non négligeable certains musiciens associés au mouvement rock psychédélique. Je pense notamment à Jerry Garcia du Grateful Dead et au guitariste Carlos Santana.
3) Miles Davis : Miles Runs the Voodoo Down (« Bitches Brew ») – CBS
Avec Miles Davis, on demeure bien entendu dans la catégorie légendes du jazz. L’une des pierres angulaires du jazz demeure « Bitches Brew » paru en 1970 et qui, avec « Hot Rats » de Frank Zappa, sera l’un des albums précurseurs de ce que l’on appelle rapidement le jazz-rock. Miles ne s’en cache pas, « Bitches Brew » trouve ses sources d’inspiration dans le rock de Jimi Hendrix et dans le funk de Sly & the Family Stone. Avant d’en écouter quatorze minutes de musiques innovantes, vous citer quelques noms des musiciens qui collaborent à l’enregistrement de « Bitches Brew » : John McLauglin, Wayne Shorter, Joe Zawinul, Chick Corea, Jack DeJohnette, Dave Holland etc etc, tous associés par la suite aux fusions du jazz et du rock au sein de différentes formations comme Return to Forever, le Weather Report ou encore le Mahavishnu Orchestra.
4) Marc Moulin : Silver (Who Stole the Groove ?) (« Entertainment ») – Blue Note
Parmi les fans inconditionnels de Miles (et collectionneur de disques), il y avait un musicien belge qui nous a quittés malheureusement il y a dix-sept ans : Marc Moulin. Marc Moulin a clairement démarré sa carrière comme musicien de jazz – ceci indépendamment de ses activités comme animateur de radio ou comme écrivain – notamment en créant le groupe de jazz-rock Placebo… Non, rien à voir avec Brian Molko puisque le Placebo de Marc Moulin a sévi pour sa part entre 1969 et 1976. Par la suite, Marc Moulin a fusionné – comme il le faisait déjà à Radio Cité – le jazz, la soul et le funk. On écoute un extrait de l’album « Entertainment » paru chez Blue Note en 2004 : « Silver » sous-titré « Who Stole the Groove ? »
5) John Surman : Nestor’s Saga (The Tales of the Ancient) (« The Amazing Adventures of Simon Simon ») – ECM
Nous poursuivons avec le saxophoniste anglais John Surman qui a démarré sa carrière à la fin des années 60 en configuration free-jazz. Par la suite, il s’intéresse aux synthétiseurs et aux techniques d’enregistrement re-recording qui lui permettent de jouer de façon quasiment autonome. C’est le cas pour ses premiers albums enregistrés pour le compte du label bavarois ECM. Avec les albums « Upon Reflection » ou « The Amazing Adventures of Simon Simon » dont nous allons entendre un extrait, John Surman est relativement proche des musiques ambient, des travaux de Brian Eno, notamment.
6) Terje Rypdal : Speil (« Descendre ») – ECM
Que serions-nous sans musiciens norvégiens ? C’est bien vers la Norvège que nous nous tournons à présent avec Terje Rypdal, un guitariste qui aura enregistré pratiquement tout son répertoire également chez ECM. Pour sa part, Terje Rypdal convient que la musique qui l’inspire à la base, c’est le rock… Mais nous sommes en Norvège, le pays du jazz, si bien que c’est avec d’autres musiciens de jazz comme le saxophoniste Jan Garbarek qu’il construira sa carrière. Vous allez l’entendre dans cet extrait de l’album « Descendre », paru en 1979, le rock (planant ici) demeure bien présent.
7) Herbie Hancock : Watermelon Man (« Head Hunters ») – Columbia
C’est avec un autre monstre sacré du jazz que nous clôturerons ce deuxième épisode de notre saga visant à démystifier le jazz. Herbie Hancock. Il fait partie du fameux quintet de Miles Davis et comme lui, il est un grand admirateur de Sly Stone auquel il dédiera d’ailleurs un titre. Le jazz ne se vend plus trop bien dans les années 70 et on prétend que ce serait donc l’argent qui aurait dévié la trajectoire musicale de Hancock qui sort quelques albums de jazz expérimentaux avant de se raviser en 1973, date à laquelle on découvre un monument du jazz-fusion, « Head Hunters ». Critiqué au départ par les fans de jazz, il sera vénéré ensuite par tout amateur de bonne musique.
Le mois prochain, nous aborderons le troisième volet de notre saga avec une heure consacrée aux albums de rock que les fans de jazz devraient écouter…
Herbie Hancock, 1973, « Watermelon Man ».
Intervalles sur Equinoxe FM
Chaque mardi à 22 heures (rediffusion le jeudi, 22 heures)
