Steiger : Mowglowski’s First Take

Steiger : Mowglowski’s First Take

Autoproduction

Depuis la sortie de leur premier EP éponyme il y a dix ans, les trois membres du trio Steiger se comportent comme de véritables caméléons. Chaque album diffère du précédent, mais ils conservent toutefois des points de repère. Avec « Moglowski’s First Take », ils s’inscrivent dans la lignée de ce qui a précédé, mais avec des accents différents.

Une constante tout au long des années : les trois mêmes musiciens. Steiger est toujours composé de Gilles Vandecaveye-Pinoy (claviers), Kobe Boon (contrebasse) et Simon Raman (batterie). Un autre élément récurrent est leur exploration constante des limites, à la recherche de nouvelles possibilités, et de toute façon en dehors des sentiers battus du jazz. Sur « Moglowski’s First Take », ils continuent à flirter avec divers styles et genres, tantôt claustrophobes, tantôt fantaisistes. Leur amour pour mélanger à cœur joie électronique et acoustique est resté intact.

Le fait que les trois musiciens soient également actifs séparément au sein de PJDS, The Milk Factory et Ivy Falls, entre autres, a laissé des traces. Un autre facteur déterminant pour le résultat final a sans aucun doute été le producteur Frederik Segers, qui était aux commandes lors des enregistrements de De Beren Gieren et Black Flower.

Ils ouvrent de manière ludique. Cela pourrait être la bande-son d’une émission pour enfants. Une simplicité apparente similaire à celle que l’on retrouve dans les morceaux de Pascal Comelade. Sur un thème répétitif, « Gauchoman » emmène l’auditeur dans un monde féérique où Telex et Kraftwerk s’ébrouaient déjà. Jusqu’à ce qu’ils sèment la confusion à la fin et se transforment soudainement en rockeurs mutants, avant de se retirer rapidement dans leur biotope antérieur.

« Moglowski » s’inspire des percussions du gamelan indonésien. C’est la touche d’exotisme de l’album, incluant quelques chœurs. « Zonnetje schijnt, Iedereen is ziek » est un exemple typique de l’avant-gardisme enjoué avec lequel ils aiment jongler. Également à décrire comme du cubisme Steiger. Pour terminer la face A, ils tirent cette ligne encore plus loin, mais toutefois avec une touche ludique (« The Latin Album »).

Le titre plutôt lugubre « Third Mass Extinction » annonce la deuxième face. Une atmosphère sinistre comparable aux images du film culte « Eraserhead » de David Lynch. « Gladijs » se déroule à un rythme plus rapide, mais avec des interruptions abruptes. Rien n’est prévisible chez Steiger. Des paysages sonores encore plus glaçants apparaissent dans « It’s My Stone ! ». « 5XP » rejoint le morceau d’ouverture. La boucle est bouclée.

Vraiment pas des mélodies joyeuses. Un album avec lequel Steiger torpille (à nouveau) tous les idiomes jazzistiques que certains veulent leur imposer. Plutôt une candidature directe pour composer de la musique pour le cinéma, le théâtre ou la télévision. En tout cas, de quoi surveiller comment tout cela se déroulera en live.
Une collaboration Jazz’halo / JazzMania

Georges Tonla Briquet – Traduction libre : Luc Utluk