Aksel Røed’s Other Aspects : Do you Dream in Colors ?
Jeune saxophoniste norvégien, Aksel Ørveås Røed (25 ans) n’est pas du genre à se contenter du conventionnel. Très actif sur la scène jazz impro du côté de Bergen, il aime pousser son groupe à penser et à jouer « out of the box ». Non pas qu’il réfute le passé (il se revendique même des Ornette Colleman, Albert Ayler ou Pharoah Sanders), il tente de nouvelles pistes, ne se donne pas de limites de genres et évite d’imposer des lignes directrices trop précises à son octette. Trois saxes, deux trompettes, un piano et une rythmique solide sonnent comme une fanfare free déglinguée ou tout est permis. Les thèmes de bases sont propices à de multiples ouvertures qui partent dans tous les sens. On construit et on déconstruit sans cesse pour lancer des idées, et on joue les contrastes, les accélérations et les sonorités. L’énergie est omniprésente, supportée, entre autres, par une contrebasse nerveuse (Sverre Sandnes Sæbo) qui passe du bop au free et rappelle parfois les fulgurances mingusiennes. Le piano (Iach Skeidsvol) n’est pas en reste et son jeu percussif oscille entre Don Pullen et Cecil Taylor. On passe de la poésie brute à la mélancolie furtive (« When You Dream in Color ») et l’on assume aussi quelques pointes d’humour dans une musique quelque peu éthylique (« Bergen Is the Prettiest in Blue »). Malgré toutes ces références (on pourrait encore citer Håkon Kornstad, Mats Gustafsson ou la bande d’Atomic), Aksel Røed’s Other Aspects sonne de façon plutôt personnelle et balance un bon coup de fraîcheur dans le jazz.