Andrea Ruggeri : Mustras
Da Vinci Jazz / Xango Music Distribution
Sur le verso de la pochette, le batteur italien nomme son groupe « Andrea Ruggeri Small Ensemble » puis nous introduit les musiciens. Au nombre de quatre, ils se partagent presque tous entre objets, machines électroniques, voix, violon, batterie, guitare acoustique et électrique. C’est principalement la chanteuse Elsa Martin qui va marquer de son empreinte ce long album de 70 minutes. Elle module sa douce voix avec aisance passant du côté évanescent proposé sur la première plage (« Early Refrain ») à des vocalises vraiment surprenantes. Elle effectue un travail de recherche sur sa voix qui passe par une réponse à un chant d’oiseau au sein d’une plage pastorale, à des choses encore plus incompréhensibles, des onomatopées, des cris perçants. Elle chante, d’accord, mais elle émet surtout des sons et énumère, égrène, des suites de mots (en italien) qui nous laissent perplexes. Parfois, cela peut venir d’une forme jazzy, d’une inspiration religieuse, voire même du milieu folk. Une démarche qui pourrait la rapprocher de l’univers de Björk ! Derrière cette intrigante chanteuse, les musiciens évoluent aussi dans un monde singulier. Si la première plage peut être qualifiée de progressive, au fil des onze compositions, toutes écrites par le batteur, nous côtoyons le jazz associé à de la lo-fi. Ce même jazz, souvent issu de la guitare électrique, rencontre le classique contemporain, propose des étirements sonores légèrement bruitistes, nous immerge dans une musique de chambre contemporaine qui part ensuite dans de l’électro alternatif. Andrea Ruggeri, avec ce second album, déclare continuer son hommage personnel à l’auteur Italo Calvino au travers de ces « Mustras », qui sont des décorations textiles sardes décrivant des scènes de la vie courante. Il déclare nous les retranscrire au sein d’une musique voulue esthétique comme sous forme de tableaux. Grâce à la rencontre entre des instruments traditionnels, des machines électroniques, des « choses » et les étonnants et audacieux chants d’Elsa. Qui seront même dissonants sur « Argia ». Et c’est sur une douce mélodie que le quatuor nous quitte après nous avoir bien surpris, mais aussi laissés souvent perplexes. Assurément « autre ».