Audrey Lauro : Prose Métallique

Audrey Lauro : Prose Métallique

Relative Pitch Records

Un jour, à la faveur des premiers jours de l’été, j’inviterai Audrey Lauro à venir jouer au Chalet de Haute Nuit, modeste demeure campée sur le mont qui surplombe l’Ourthe dans la localité de Tilff. Là même où naguère je fis mander Tom Malmendier en plein confinement pour qu’il nous ouvre des portes qui nous demeuraient fermées. Je lui assignerai la place sous le pin dans le fond du jardin. Pour l’occasion, j’aurais convié un public que je voudrais curieux, mais non initié à sa musique, des oreilles vierges. La brise du soir attiserait un doux remous dans les frondaisons des arbres alentour. Je pense qu’elle s’en accommoderait, que son jeu n’en serait pas perturbé, que peut-être elle y intégrerait le matériau sonore impromptu du vent, des feuilles. Je l’imagine lancée dans le décours de ses proses, plastique, métallique, tellurique. Un chant de cuivre, un chant des terres. Parfois mouvementé, parfois apaisé. Parfois tellement discret qu’il s’apparente au chuchotement. Avec pour seul viatique son saxophone alto. Un instrument préparé, fouillé, exploré dans tous ses recoins, son bec, ses clefs, son corps, sa surface. J’ignore si elle aurait recours à une amplification ou si elle laisserait le son à lui-même. Ce serait une de ces journées de juin où la nuit tarde à venir. Une de ces nuits sidérales qu’abriterait un putain de ciel belge dont on ne sait jamais s’il annonce un orage ou une accalmie.

Eric Therer