Blossom Dearie : Little Jazz Bird 1952-1959
Frémeaux et Associés ‐ Références : coffret 3 Cds et livret 12 pages (avec photos) FA 5780
Avec sa voix douce voire enfantine, rien ne semblait destiner Blossom Margerete Dearie à une grande carrière dans le jazz. Mais c’était sans compter sur son réel talent de pianiste. Née à Durham (New York) d’un père britannique et d’une mère norvégienne, elle étudie le piano classique puis découvre le jazz à l’adolescence. Elle s’installe en ville où elle commence une carrière de pianiste avec des groupes vocaux comme The Blue Flames (avec Woody Herman) et The Blue Reys, avant de se faire remarquer par King Pleasure en 1952, avec lequel elle chante en duo un « Moody’s Mood For Love » repris sur le CD1 du coffret. La même année, elle part s’installer à Paris où elle rencontre son futur mari, le saxophoniste belge Bobby Jaspar. Elle apprend la langue française et forme les Blue Stars, un groupe remarqué par Eddie Barclay, qui leur fait enregistrer un premier album sorti en 1955 et dont les 8 titres se retrouvent également ici sur le CD 1. Avec, entre autres, « April in Paris » et « Blue Moon » qui accrochent l’attention. B. Dearie y joue du piano mais ne chante pas. L’année suivante paraît un 45 tours avec 4 titres instrumentaux encore (toujours présents sur le CD 1). Peu après, elle connaît la chance de sa vie : elle est remarquée par Norman Granz qui la signe pour Verve Records. Elle rentre aux Etats-Unis la même année et enregistre un album avec Ray Brown (bs), Herb Ellis (gt) et Jo Jones (dms) pour lequel elle tient le piano et chante 13 des 14 titres (dont 4 en Français ou bilingues, « Comment allez-vous ? » , « C’est le printemps – It Might as Well Be Spring », « I Won’t Dance » et « Tout doucement »). D’autres titres excellents et bourrés de swing ne manquent pas, comme « Deed I Do », « Lover Man », « Everything I’ve Got », « Thou Swell », …
Le 2è CD du coffret rassemble 2 albums gravés par B. Dearie pour Verve Records en 1958. Pour le premier, « Give Him the Ooh-La-La », on la retrouve avec la même formation que l’album précédent. Il contient le superbe « Plus je t’embrasse », un titre qui, selon ses propres dires, a beaucoup influencé Thomas Dutronc pour sa propre version parue sur son album « Frenchy » en 2020. D’autres morceaux retiennent l’attention comme le titre éponyme ou aussi « Bang Goes the Drum And You’re in Love ». Le 2è album date de la même année avec Ray Brown (bs) Ed Thigpen (dms) et Mundell Lowe (gt). Il est intitulé « Once Upon a Summertime ». Il s’agit de l’adaptation anglaise, réalisée par Johnny Mercer, à la demande de Blossom Dearie, d’un morceau composé par Eddie Barclay et Michel Legrand sous le titre « La valse des lilas », un tube repris par de nombreux interprètes (Catherine Sauvage, Jacqueline François, Sarah Vaughan, Tony Bennett, …) Outre le titre éponyme, les faces dignes d’intérêt abondent comme « Teach Me Tonight », langoureux et suggestif, « Moonlight Saving Time », « If I Were a Bell », « We’re Together » ou « Down With Love » en up-tempo.
Sur le 3è disque du coffret, on retrouve les 2 albums Verve gravés en 1959. Sur le premier, dont le titre est « My Gentleman Friend », Dearie est accompagnée par Ray Brown (bs), Ed Thigpen (dms), Kenny Burrell (gt) et Bobby Jaspar (flute et sax ténor). On y découvre le titre éponyme du coffret, « Little Jazz Bird », un surnom qui va comme un gant à la chanteuse / pianiste et un slow gentiment syncopé comme « Gentleman Friend » (avec un K.Burrell en grande forme). On notera encore d’autres faces pleines de swing comme « It’s too Good to Talk About Now ». C’est le cas aussi des morceaux chantés en français : les deux compositions de Paul Misraki, « Chez Moi » (avec B.Jasper à la flute et un beau solo de K.Burrell) ) et « L’étang », sans oublier « Boum ! » de Charles Trenet (B. Jaspar très inspiré à la flute). Le 5è album Verve est entièrement consacré aux chansons du duo Betty Comden – Adolph Green, dont un trépidant « It’s Love ».
Par la suite, la carrière de B. Dearie va se poursuivre sans écueils, avec un 6è album pour Verve, et une participation régulière à des shows radio et TV. En 1962, son spot publicitaire pour « Hires Roots Beer » remporte un succès public considérable. Puis elle grave un album avec un big band en 1964. Elle va se produire régulièrement dans les clubs new-yorkais mais aussi en Europe, des années 60 jusqu’en 2006 (« Ronnie Scott », Londres, 1966). Dans les années 60, elle enregistrera 4 albums en Angleterre pour Fontana Records et en 1974, elle créera sa propre compagnie de disques, Daffodil Records, pour mieux contrôler ses productions et leur distribution. Ses chansons et sa voix sont au générique de nombreux films. Blossom Dearie meurt à New York en février 2009. Bravo à Olivier Julien qui a assumé la direction artistique et la rédaction des notes du livret pour Frémeaux et Associés.
