Ça jazz à Huy édition 2023 (03 au 06/08/23)
Les organisateurs de cette nouvelle édition voulaient opérer un changement assez radical et cela leur a bien réussi. Terminé les concerts éparpillés, tout était concentré au Couvent des Frères Mineurs. Le programme était allégé mais bien dirigé, chaque soir, vers un public quelque peu ciblé. Et au final, tout le monde s’est intéressé aux concerts de styles différents.
Marc Frankinet et son quartet comprenant le guitariste Jacques Pirotton, le bassiste Benoit Vanderstraeten et le batteur Antoine Cirri ont ouvert cette édition en rendant hommage au Real Book et ses compositeurs liégeois, créateurs d’une belle richesse musicale. Que les quatre compères ont salué en reprenant des œuvres dues, entre autres, à Jacques Pelzer, Garrett List, José Bedeur ou Bobby Jaspar. Entrecoupée de brefs solos, la prestation du quartet a laissé une belle place au jeu tout en finesse du guitariste, aux émotions émanant du sax ou du bugle. Le vétéran mais toujours alerte saxophoniste Robert Jeanne fut invité sur trois titres dont le rappel, une composition de Dave Brubeck.
Le quintet Iota ouvrait la seconde soirée qui voyait un public connaisseur, proche des groupes annoncés, donc nettement plus jeune et qui allait contribuer au succès mérité des concerts. Derrière les deux chanteuses, habillées en bleu (hommage à la fameuse note !), un efficace trio piano, basse, batterie délivre un jazz électro groovy. Avec les vocalises du duo féminin, Iota me remémorait quelque peu certains albums scandinaves. Que me confirmait le titre« Lazy », une ode à la paresse, au lâcher prise… Mais le tout s’emballait ensuite grâce à « Japan Extasy », grâce à des intonations jungle et même un peu de spoken word. Après 45 belles minutes et le soutien du public debout, dansant, ils nous quittaient sur « Waves » un rappel qui laisse augurer du meilleur, certainement sous la forme d’un premier album. Seul derrière sa batterie pourvue de supports électroniques (samples, programmations même vocales) et entouré d’un efficace light show, Antoine Pierre proposait Vaague. Une fusion entre son instrument fétiche et des apports électro, de la techno space, du planant, de la world, des bruitages, un peu de dub, voire du rap « à la Cypress Hill ». Le tout placé au bout de ses baguettes. Qu’il levait parfois comme un dj qui annonce l’explosion dance ! Nous avons profité du show et des sonorités situées quelque part entre Moby et Prodigy avec, quand même, quelques connotations jazz. Ce musicien est décidément un insatiable chercheur.
Beaucoup de monde avait rejoint le site pour la dernière soirée qui proposait Aka Moon. Que rajouter encore sur ces talentueux musiciens qui font l’unanimité à chacun de leurs concerts ? En trio ou avec des invités, ils sont toujours aussi ravis d’être sur scène, cela se ressent, se voit au travers de regards complices, interrogateurs, souriants. Parvenant encore à se surprendre. Chacun y est allé de son petit solo mais c’était toujours classieux. Et que dire de ce duo basse batterie tout simplement fabuleux ? Tout comme leur jazz puissant, unique que propulse cette basse funky et ce Stéphane Galland, oserai-je le dire, un des meilleurs batteurs au monde. Combiné avec le sax de Fabrizio Cassol, nous tenons toujours là une des plus inventives formations jazz. Après ce set enthousiasmant c’est aux sons electro-jazz-lounge-world du dj brésilien Apex que la soirée s’est terminée.
Un dernier bon moment en ce lieu puisque le dimanche c’est aux rythmes manouches de l’accordéon de Tchavo Berger en formation quartet que tout s’est terminé sur les hauteurs de la ville. Au Cortina. Pour son soutien aux organisateurs, il mérite d’être cité. Et eux tous méritent nos soutiens pour cette belle reconversion et ce regain d’enthousiasme.