Costanza Alegiani

Costanza Alegiani

Costanza Alegiani, Fair Is Foul And Foul Is Fair (www.improvvisatoreinvolontario.com)

 

Née à Rome en 1984, Costanza Alegiani a poursuivi sa formation musicale au prestigieux Conservatoire de Frosinone, où a enseigné notamment Enrico Pieranunzi, pour rejoindre ensuite le Département Jazz du Conservatoire de Bruxelles, en tant que professeur répétiteur dans la classe de chant. C’est là qu’elle a conçu ce projet “Fair Is Foul And Foul Is Fair”, en hommage à Giuseppe Verdi, le chantre du patriotisme italien, à l’occasion du bicentenaire de sa naissance. Ce n’est pas la première fois que des musiciens de jazz puisent leur inspiration dans l’opéra italien, des mélodies qui font partie de l’inconscient collectif grâce au rayonnement des bandas, mais que ce soit Enrico Rava (“Rava l’opéra va”) ou Gianluigi Trovesi (“Profumo di Violetta”), aucun n’avait intégré le chant dans leur projet. Centré sur le thème du destin (Costanza est aussi diplômée en philosophie de l’Université La Sapienza de Rome), le présent album s’inspire de deux opéras, d’une part, Othello (Desdemona’s Dream, An Old Song, Willow Song), d’autre part, Macbeth (Fair Is Foul, Alas Poor Country-Messenger, Alas Poor Country- Refugees), le titre de l’album est d’ailleurs une des répliques prononcées par les sorcières de Macbeth.

Cet intérêt de Costanza Alegiani pour l’opéra n’apparaît pas que dans ce projet, elle a travaillé comme chanteuse soliste dans différents productions théâtrales, de Peer Gynt à L’Opéra de quatre sous de Bertold Brecht avec le Musa Orchestra de Rome. Pour ce qui est de la partition musicale, la chanteuse romaine marie, avec bonheur, parce qu’elle évite toute rupture de style, des thèmes de Verdi (Alas Poor Country. Refugees et Willow Song Desdemona) et des compositions personnelles (Fair Is Foul, A Messenger, Desdemona’s Dream), un folk song anglais (An Old Song) et des improvisations instrumentales qui interviennent comme des respirations entre les parties chantées, que ce soit en anglais, la “langue du jazz” (plages 2-3-6-8) ou en italien, la langue de l’opéra (plages 4 et 9). Aux côtés de la Romaine, un excellent trio rythmique constitué de Thijs Troch (du Jukwaa Trio) et de deux compatriotes installés à Bruxelles : le contrebassiste Daniele Cappucci (membres des groupes de Joachim Caffonnette et d’Adrien Volant) et le batteur Armando Luongo (complice de Cappucci dans ces deux formations et membre de Saying Something). En lieu et place d’un quatuor à cordes, Costanza Alegiani a opté pour trois souffleurs à la sonorité fluide : le flûtiste Jan Daelman (complice de Troch au sein de Seraphic 4), le saxophoniste alto Ben de Greef (du Rumble Jungle Orchestra) et le saxophoniste ténor Thomas Jillings (du duo Linus avec le guitariste Ruben Machtelinckx). Après une introduction instrumentale improvisée en guise de prologue, la voix de Costanza Alegiani s’élève pour invoquer le destin, avec un timbre de voix et des inflexions qui font penser à la feinte fragilité de Maria Joao. Tout au long des plages chantées, elle interprète la mélodie d’une voix fluide et limpide, tout en laissant beaucoup de place à ses musiciens : belles intros de piano et basse sur Alas Poor Coutry et Desdemona’s Dream, beaux solos de piano et flûte sur Fair Is Foul, osmose subtile entre flûte et archet sur Intermezzo, beau mariage entre saxophones et flûte sur Willow Song. Enregistré à Bruxelles au studio Igloo par Daniel Léon, cet album est distribué par le label indépendant italien Improvvisatore Involontario : une nouvelle pierre à cet édifice qu’est ce jazz italien, témoin d’un riche patrimoine culturel mais toujopurs en prise avec son époque.
Claude Loxhay

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