Enrico Pieranunzi, Marc Johnson & Joey Baron : Hindsight – Live At La Seine Musicale

Enrico Pieranunzi, Marc Johnson & Joey Baron : Hindsight – Live At La Seine Musicale

CamJazz / L’autre distributio

Dans le texte amoureux de François Lacharme qui accompagne cet album, celui-ci fait référence au premier concert d’Enrico Pieranunzi donné à Paris à l’automne 1987. Bien avant cette date, le pianiste italien était le pianiste préféré de Chet Baker en Italie, une référence. C’est aussi quelques mois après cette première apparition (« apparition », on pourrait quasi lui donner un sens mystique) qu’Enrico Pieranunzi enregistrait le dernier album studio du trompettiste « The Heart of the Ballad » (que j’ai évoqué il y a peu). Tout ceci pour nous amener à ce concert à l’Auditorium de la Seine Musicale à Boulogne-Billancourt le 13 décembre 2019. Une parenthèse (enfin, façon de parler !) pour Cole Porter et le reste du programme est entièrement composé de compositions personnelles du pianiste romain, tout comme ce fut souvent le cas avec Chet (cf « Chet meets Enrico » en 1979 où à part l’inévitable « My Funny Valentine » tout est de la plume de Pieranunzi). Outre le fait d’être un pianiste d’exception, Pieranunzi a toujours eu ce « Je Ne Sais Quoi » – c’est le titre du thème en ouverture – qui charme l’oreille. Et quand à ses côtés, on trouve le dernier bassiste de Bill Evans, Marc Johnson, et un des batteurs les plus talentueux dans la « jouerie » du trio, tout est dit avant même d’avoir posé la galette, et sans doute même avant d’avoir entamé la lecture des liner-notes du tout aussi charmé Lacharme. « Je Ne Sais Quoi » est mélodique et tendre à souhait jusqu’à ce que Joey Baron « impose » son solo, mouvement d’humeur-humour dont le batteur est friand. « Everything I Love » est le seul standard du concert, un Cole Porter emmené dans une tradition très evansienne et marqué d’un solo de Marc Johnson. « B.Y.O.H » (Bring Your Own Heart), on le retrouve sur un « live at Theater Gütersloh » de 2015, une version tout aussi lyrique ici en son début, mais où, sous l’impulsion de Baron, la dynamique monte dans le cœur de l’interprétation. « Hindsight » signifie « rétrospection », une façon de nous dire que le retour à l’essentiel de la tradition – Bill Evans, Paul Bley, Wynton Kelly… – est une source inépuisable pour avancer, même sur un tempo de valse que Pieranunzi emmène avec chaleur. Les trois derniers titres de ce live à l’Auditorium de la Seine Musicale sont de la même veine, celle des tout grands pianistes, ce qui fait résonner cette sortie comme un grand témoignage d’un des plus beaux pianistes toutes catégories confondues.

Jean-Pierre Goffin