
Eric Doidy & Lola Reynaerts : New Orleans, 100 ans de musiques
Dans une longue et intéressante introduction, E. Doidy développe l’importance de la Nouvelle Orleans dans l’histoire des musiques africaines-américaines et, par extension, celle de toutes les musiques populaires. Cette ville fut – et reste – un carrefour incontournable des cultures et un creuset de tous les styles musicaux, de la fin du 19è s. à nos jours. Elle est située idéalement sur le plan géographique : un port de mer sur le Golfe du Mexique ouvert au reste du monde, près du Deep South (Mississippi, Texas,…), près des Iles (Cuba, Caraïbes, Antilles …), de l’ Amérique centrale et du sud, etc. Il y eut là-bas un brassage de talents, de musiciens et de créateurs à nul autre pareil. Les instrumentistes et vocalistes de NOLA et leurs hôtes ont été de tous les combats, ils ont participé à la naissance et au développement de tous les styles musicaux : le jazz, le blues, le R&B, le rock, la soul, le gospel, le zydeco, la musique cajun, le rap et le bounce (rap spécifique de NOLA), les chants hybrides des Mardi Gras Indians, le funk et toutes leurs variantes comme leurs satellites. Qui dit mieux ?
E. Doidy et Lola Reynaerts se sont répartis le travail, cette dernière assurant en sus les photographies en noir et blanc de l’introduction. E. Doidy prévient que le foisonnement d’interprètes et d’enregistrements réalisés là-bas est tel que le choix et le traitement par les 2 auteurs de 100 musicien(ne)s ou groupes avec, pour chacun(e), leur album emblématique, ne peuvent être que subjectifs, quoique basés sur des critères objectifs tels que le retentissement médiatique et les échos flatteurs d’une critique unanime… C’est aussi une invitation aux découvertes. Ajoutons que les albums présentés ont tous un point commun : ils ne peuvent venir que de NOLA, ils en ont le cachet inimitable et n’auraient pu être réalisés ailleurs. La sélection suit l’ordre chronologique de parution des albums retenus, de 1955 (Papa Celestin : « Papa Celestin’s Golden Wedding » – Southland Records) à 2021 (Cha Wa : « My People », Single Lock Records) en passant par toutes les icones musicales de la Crescent City. Une fiche biographique à la fois complète mais succincte, se limitant à l’essentiel, est suivie d’une analyse du disque choisi et de son impact sur le show business. On ne peut citer tout le monde mais on y retrouve évidemment des grands noms des Marching Bands et du jazz comme le Dejean’s Original Olympia Brass Band, Jelly Roll Morton, King Oliver, Louis Armstrong, Sidney Bechet, Kid Ory, Wynton et Ellis Marsalis, le Dirty Dozen Jazz Band, le Rebirth Jazz Band, Kid Thomas, Billie et DeeDee Pierce, etc. Blues et R&B/Soul sont bien présents avec, entre autres, Lonnie Johnson, Champion Jack Dupree, Snooks Eaglin, Prof. Longhair, Guitar Slim, Cousin Joe, James Booker, Fats Domino, Little Richard, Aaron Neville et les Neville Brothers, Dr. John, Irma Thomas, The Meters, Allen Toussaint, etc. Le Gospel est plus pauvrement à l’honneur, avec seulement Mahalia Jackson, Rev. Utah Smith, Rev. Charlie Jackson et Sister Gertrude Morgan, comme la musique cajun avec Bruce Daigrepont et Zachazy Richard, ou le zydeco avec Clifton Chenier, Lynn August, Beau Jocque et Dwayne Dopsee. Les Mardi Gras Indians sont rondement menés par les Wild Tchoupitoulas, les Wild Magnolias, les Golden Eagles et, cerise sur le gâteau, les auteurs mettent en avant la génération montante, des artistes comme Trombone Shorty et Leyla McCalla mais aussi Mia X, Big Freedia, Cha Wa, Coolbone, Crowbar ou Juvenile et Jon Batiste.
Ce livre fera date de par sa pertinence, son éclectisme dans le choix des artistes ainsi que dans le rôle essentiel joué par NOLA dans le développement de la musique populaire, toutes générations confondues….NOLA le valait bien !
Eric Doidy & Lola Reynaerts
New Orleans, 100 ans de musiques
Le mot et le reste
264 pages, 10 photos n&b, bibliographie
ISBN : 978-2-38431-077-7