Gabriele di Franco & Francesco Negro : Cantabile

Gabriele di Franco & Francesco Negro : Cantabile

Da Vinci Jaz

Il vaut toujours mieux ne pas rater son entrée. Et quand on décide de la faire « a cappella » en confiant la tâche à son invitée, la gageure n’en est que plus osée. Mais ici, le pari est parfaitement réussi et la magie opère. Sur cet album du duo Gabriele di Franco (g) et Francesco Negro (p) intitulé à juste titre « Cantabile », le chant de Vanesa Diaz Gil (sur deux titres) subjugue et semble donner la ligne directrice. Aussitôt, on part en exploration musicale. S’enchaînent alors des moments plus méditatifs ou plus ésotériques (« Peace » ou « Ombre ») où guitare et piano se fondent dans des effets cosmiques, flirtant parfois avec l’abstraction, et offrant une constellation de couleurs irréelles. Le duo se balade ensuite entre mélodies mélancoliques (« LAMA » ou « Bloemen ») finalement déchirées par des motifs entêtants et tranchants à la Keith Jarrett, puis dose bien les émotions qu’il allège parfois en empruntant lointainement au folk. Di Franco et Negro maîtrisent les tensions et les reliefs, confondent avec esprit les harmonies. Ils laissent de côté l’évidence et s’attardent à révéler les sentiments dans un lyrisme non ostentatoire. Chacun des deux musiciens s’écoute, se répond, se supporte, joue avec les attentes et les silences (école Steve Reich). On se laisse embarquer. L’album se referme délicatement, presque romantiquement, avec une version sensible de « Oh My Love », tirée d’un film italien assez controversé des années ’70, « Addio zio Tom », comme pour aller rechercher la beauté qui se cache sous nos noirceurs. Enchantement.

Jacques Prouvost