Gaume Jazz, la quarantaine et la forme ‐ retour sur quelques moments forts de l’édition 2024
Pour sa quarantième édition, le Gaume Jazz a attiré un public encore plus nombreux que d’habitude : gros succès public et artistique.
Avec aussi une pensée vers celle qui aurait dû illuminer la grande scène avec le projet consacré à Judy Garland : Jody Devos était présente dans tous les cœurs et sur toutes les scènes du festival avec de belles photos de la chanteuse.
Youn Sun Nah et Benjamin Moussay au sommet de l’art vocal et instrumental
Elle en était à son troisième passage sur la grande scène du chapiteau : avec Ulf Wakenius la première fois, puis avec sa formation « US », celle de l’album « She Moves On ». En duo piano-voix cette fois, un piano dont les trois claviers – acoustique, électro et Fender- sous les doigts de l’inventif Benjamin Moussay, pétillaient de trouvailles sonores. Ajoutant quelques touches de kalimba ou de boîte à musique, la chanteuse a emballé le nombreux public avec les thèmes de son récent album : « Feeling Good » en ouverture avant le dynamique « I’ve Seen That Face Before », puis un gospel avec des claviers qui colorent la pièce avant un final en respiration circulaire époustouflant. Clou du concert, un titre-hommage à Norma Winstone, « Just Sometimes », un petit bijou de délicatesse.
La thérapie par les cordes.
« Thérapie de Couple », c’est Daniel Erdmann de l’autre côté du Rhin, Hélène Duret et ses clarinettes pour la France, voilà pour le souffle ; rayon cordes, Théo Ceccaldi et Vincent Courtois pour quelques époustouflantes séquences. Basse et batterie pour le côté rythmique. Le sextet nous a mené dans les arcanes de la relation France-Allemagne avec parfois un humour décalé qui mêlait Louis de Funès – « Le Français qui nous a fait rire des Allemands ! » – à la chanteuse allemande Amika avec le titre plutôt pop « Je ne Parle Pas Français », aussi avec un titre comme « I Wanna Hold Your Hand, François ! », phrase imaginaire d’Helmut Kohl à François Mitterrand ! Le violon de Théo Ceccaldi et le violoncelle de Vincent Courtois mettaient en avant, sur des solos magistraux, le rôle des cordes aux côtés du saxophone de Daniel Erdmann et des clarinettes de Hélène Duret, un concert d’une densité impressionnante. La soirée de vendredi nous offrait déjà deux moments mémorables.
Fabian Fiorini, la liberté du trio
« Abyss Mesa », le projet de Fabian Fiorini curieusement destiné au jeune public a été mon coup de cœur de cette 40e édition. « Abyss Mesa », entre abîmes marins et montagnes, ce sont toutes les possibilités du jazz qu’offrait le trio de Fabian Fiorini soutenu par une rythmique superlative, Dré Pallemaerts et Nic Thys. Le concert démarre autour de deux standards, « Footprints » et « Nostalgia in Time Square » avant une litanie telle une procession rythmée par les balais de Dré Pallemaerts. On flirtait avec le classique par moments dans des envolées qui ont fait se croiser Rachmaninov et la musique contemporaine sur des séquences à flux tendu à deux mains suivis de moments de détente dans une véritable mise en scène musicale qui montait à son paroxysme. Un tout grand moment du festival.
Rêverie hellène
Des paysages musicaux qui évoquent son pays, la Grèce, et les pays méditerranéens, c’est la promenade proposée par Tina Giannouli. Sur les sonorités du oud et de la trompette, la pianiste crée de douces mélodies poétiques, raffinées et répétitives, parfois chantées. Musique atmosphérique où la trompette de Jakob Bänsch déclinait des sonorités imagées souvent réussies, le oud étant malheureusement un peu trop peu sonorisé.
Judy pour Jodie
C’était le rêve de Jodie Devos de chanter un jour Judy Garland. Elle nous avait déjà révélé son amour des grands standards américains il y a quelques années avec Steve Houben et Jean-Philippe Collard-Neven. Le destin en a voulu autrement et c’est son binôme Neïma Naouri qui a superbement pris le relais avec l’Amazing Keystone Big Band de David Enhco. Un répertoire plein de joie où s’enchaînaient les grands classiques comme « Over the Rainbow », « Moonriver » ou l’entraînant « Get Happy » sur des arrangements au cordeau du tromboniste Bastien Ballaz dans la tradition très swing des comédies musicales américaines. Un amusant « It Never Rains » interprété en mambo avec un solo de piano bien balancé, ainsi qu’un époustouflant suraigu de la soprano Neïma Naouri clôturaient le concert, ovation du public debout.
NDLR : notre correspondant n’était pas présent sur le site dimanche…