J J Grey & Mofro : Olustee

J J Grey & Mofro : Olustee

Cet article est publié à titre posthume. Notre ami Robert Sacre nous a malheureusement quittés ce 22 février.

Alligator Records ‐ Références catalogue : ALCSD 50

Grey est un multi-instrumentiste (chant, guitares, dobro, keys, hca) et auteur-compositeur, un farouche défenseur des ressources naturelles, il milite au sein de groupes de défense de l’environnement – en particulier dans sa Floride natale – et pour la préservation sans limites de la faune sauvage, de la flore, des rivières et des marécages, les Everglades par exemple, comme l’héritage des Séminoles, les premiers occupants. Il a démarré sa carrière professionnelle de musicien en 2001 avec deux albums pour Fog City Records suivis de cinq albums, encensés par la critique et les amateurs, pour Alligator Records entre 2008 et 2013 (+ un vinyle « Best of »), un album « Provogue » (2015) et après neuf ans de réflexion et de ressourcement, le voici de retour chez Alligator pour son neuvième album ultra peaufiné. Grey a composé dix des onze faces, toutes produites par lui et, cerise sur le gâteau, les paroles sont toutes reproduites dans les notes de pochette. Ces faces, comme d’hab’, sont difficiles à ranger dans des cases précises, c’est un mélange de soul, de swampy Southern rock, de funk, d’Americana, de blues et même de musique classique puisqu’il a invité le Budapest Symphony Orchestra à l’accompagner ! Ce sont l’émotion, l’intensité, la poésie et le lyrisme qui dominent de bout en bout, comme dans le titre éponyme, « Olustee », le souvenir d’un incendie de forêt terrifiant et dévastateur, une face enlevée et martelée frénétiquement à l’harmonica et à la guitare, c’est encore le cas quand il évoque des joies simples comme dans « The Sea », la mer, le surf et la pêche qu’il aime et lui apportent le calme quand il est survolté et soucieux, « Deeper than Belief », quand tout suit son cours au-delà de ce à quoi on s’attendait, le festif « Top of the World », une ode à l’amitié même avec des inconnus, « On a Breeze » mélancolique mais témoin de son émerveillement pour ce qu’il observe dans la nature, un jubilatoire « Wonderland » sur le bonheur à portée de main, comme « Starry Night » (une soirée au coin d’un feu de camp sous les étoiles avec celle qu’il aime) et, sur tempo rapide, « Free High », image d’un bonheur exultant, etc. Le charisme de Grey est époustouflant, que ce soit dans de courts passages a capella ou dans les faces boostées par des parties de guitares, acoustique et électrique, au top, comme le funky et incantatoire « Rooster », le coq de la pochette, courageux et dévoué à sa famille jusqu’à la mort, comme « Waiting », une complainte en slow sur le comportement consistant à reporter à plus tard ce qu’on pourrait faire de suite et comme la cover, « Seminole Wind, » de John Anderson, un plaidoyer pour les Everglades où l’empreinte humaine est catastrophique. De quoi alimenter de profondes réflexions. Puissant !

Robert Sacre