Jimmie Bratcher : I’m Hungry ‐ Red-Hot Smokin’ Blues To Inspire Your Appetite !
Obsédé par la (bonne?) bouffe notre Bratcher ? En tout cas, c’est un Épicurien qui vante les bienfaits de la table : il a faim ! Il réside à Kansas City et il est à la fois chanteur, compositeur, guitariste et… Pasteur ! Surnommé Electric Rev’ ! C’est original, d’autant plus qu’avec l’aide de sa femme Sherri, il a compilé un livre de plus de 200 recettes accompagné d’un album où tous les morceaux, comme le bouquin, sont inspirés par l’art culinaire en général et par la « soul food » du Sud en particulier. Sa musique s’inspire largement du blues et il en profite pour délivrer des messages spirituels. Il faut savoir qu’il en est quand même à son 12è album.
Bratcher a réuni ici des musiciens de Kansas City et de Nashville, amis de longue date comme Craig Kew (bs), Terry Hancock (dms) et pas moins de deux autres batteurs et quatre pianistes et organistes qui se succèdent au fil des titres. Bratcher a composé dix des douze faces. Tout part en fanfare avec « I Love Her Name » pour lequel le pianiste John Selle dresse la table pour les plats délectables qui vont suivre, sur un rythme de barrelhouse boogie endiablé (sorry, Pasteur !) soutenu par Bratcher (gt, vo). Ensuite, ce dernier joue le rôle du pauvre type mis au régime par son toubib et qui doit renoncer à certains de ses plats favoris. Cela donne l’humoristique « Mama Won’t Fry no Chicken ». Il doit se rabattre uniquement sur les bonnes odeurs des plats en cuisson dans « Bacon on My Mind » un slow blues où sa frustration transparaît dans son chant tendu et ses fulgurances agressives à la guitare. Il y a du double entendre dans la ballade « Baby I Like Your Cooking » en slow. Dans le bien enlevé « Where You Gonna Stop », Bratcher nous fait faire le tour des bons restaurants de K.C., réputés pour leurs BBQ et il cite les noms… Avis à ceux qui envisagent un tour là-bas quand la pandémie de Covid 19 ne sera plus qu’un mauvais souvenir ! «Greasy » est un beau slow blues instrumental. Ensuite, Bratcher critique le manque de saveur généralisée de la volaille dans un bien syncopé « Chicken Tastes the Same », sur un rythme de rumba avec du vibrato dans la voix pour marquer sa déception. Quant à « Green Bananas », c’est une ode à « Carpe Diem », sur un rythme syncopé style New Orleans second line. En medium, c’est superbe. Et ce n’est pas tout, car le « Bologna Sandwich Man », c’est lui. Il célèbre ainsi un de ses mets préférés et cela se déroule sur un rythme saccadé, entraînant. L’album se termine joyeusement avec « Happy », un instrumental enlevé et, même sans paroles, on peut deviner qu’il a très bien mangé et qu’il en est heureux. Il y a encore les reprises, comme « Goverment Cheese » (Keb Mo’), une ballade chaloupée en médium au contenu politique, faisant référence aux difficultés matérielles rencontrées par pas mal de gens, ce qui se répercute sur leur alimentation, ceux-ci devant se contenter du fromage (de piètre qualité) distribué par les autorités. Surtout il y a « Grits Ain’t Groceries » (un morceau Stax soul classique de Little Milton de 1969) délivré en puissance, dans lequel Bratcher est particulièrement inspiré, tant au chant qu’à la guitare. Bon appétit !