John Coltrane : Evenings at the Village Gate
Le retour du vinyle de qualité supérieure est une réelle bénédiction pour l’amateur de jazz, et surtout ces derniers temps, de Coltrane. : il y a eu les « Complete Masters » de « Blue Train », « A Love Supreme Live at Seattle », l’unique version en public étant à ce jour celle, mythique, d’Antibes, voici un inédit que les fans du saxophoniste ne rateront sous aucun prétexte. Nous sommes en 1961, le quartet de légende n’est pas encore au complet : McCoy Tyner et Elvin Jones sont bien là, mais on attendra encore un peu avant de voir arriver Jimmy Garrison à la contrebasse, avec ici Reggie Workman pour cette session au Village Gate totalement inédite. Au quartet se joint Eric Dolphy, partenaire occasionnel de Coltrane à l’époque et qui, comme l’explique les notes de l’album, a été invité par Coltrane à rejoindre le quartet, autant dire que ces deux-là réunis allaient offrir un set d’enfer. L’album s’ouvre sur le hit de l’époque, « My Favorite Things » que le saxophoniste reprend d’une comédie musicale à succès, une version qui s’ajoute à toutes celles « live » déjà publiées, mais avec ici la brillance du timbre de Dolphy sur une version de plus de quinze minutes.
Autre thème malaxé par Coltrane est « Greensleeves », chanson médiévale qui fait aussi l’objet d’un traitement à la limite de l’obsession sur plus de seize minutes, tout comme « Africa » qui conclut l’album. Mais l’amateur de Coltrane savourera à coup sûr un morceau rare dans la discographie du sax-ténor, la composition de Benny Carter « When Lights Are Low » qui nous offre un solo de clarinette basse d’anthologie de Dolphy. Celui qui pense que toutes ces sorties inédites sont du simple commerce doit absolument écouter cet ovni sorti d’on ne sait où (enfin, si on le sait, il vous reste à lire les nombreux textes qui accompagnent l’album pour l’apprendre, textes d’Ashley Kahn, Wynton Marsalis et Lakecia Benjamin, et souvenirs de Reggie Workman). Les mordus de Coltrane se régaleront de cette nouvelle pépite, les grincheux de la perfection sonore trouveront peut-être à redire sur la qualité du son, mais cet enregistrement est tout simplement historique.