
Jordi Cassagne Barbastelle : Vestige Etésien
Barbastelle est le quintette du contrebassiste Jordi Cassagne, rejoint par les joueurs d’anches Yann Lecollaire et Hanne De Backer, la violoncelliste Adèle Viret ainsi que le batteur Samuel Ber. Ils exploitent ce « Vestige Étésien » comme vecteur pour rapprocher le baroque de la Renaissance et le jazz pionnier à la Eric Dolphy. Entre tout cela, ils tissent encore des liens avec Debussy et Bartok. Une initiative audacieuse, mais les cinq musiciens n’en sont pas à leur coup d’essai. Depuis des années, chacun participe à des projets qui dépassent les genres. Déjà dans le morceau d’ouverture « Asphodèles », ils jouent immédiatement sur les contrastes entre la section rythmique agitée d’une batterie et d’une contrebasse et la combinaison tempérée d’un violoncelle et des deux souffleurs. « Satori » est un passage méditatif teinté de zen, incluant le murmure d’un petit cours d’eau. Un poème sonore poétique aux connotations néanmoins sombres. D’ailleurs, cet ensemble n’est jamais sans engagement. Ils colorent leur musique de chambre d’ornements jazz et des éléments stylistiques classiques apparaissent dans les structures jazz les plus explicites. Les morceaux entièrement improvisés, en l’occurrence « Écorce » et « Écueil », sont deux exemples marquants de leur soif d’expérimentation. La composition de l’instrumentation est alors à nouveau un clin d’œil au « broken consort » de la Renaissance. Les titres font principalement référence à la nature, à des concepts philosophiques et à des phénomènes géologiques. La couverture comporte un texte de l’auteur et psychothérapeute belge Henry Bauchau. Cet album parait sur le label berlinois d’avant-garde AUT records, qui regorge d’enregistrements impossibles à cataloguer. Surtout, n’oubliez pas de regarder et d’écouter les deux sublimes films vidéo qui accompagnent cette sortie, « Diptych part I » et « Diptych part II ». Leur conception de l’impermanence y est encore plus amplifiée. Comme sur le CD, les impressions contemplatives et l’impact des petits changements dominent la sensation finale. Le metteur en scène était Cassagne lui-même.
Une collaboration Jazz’halo / JazzMania