Laughing Bastards : Fetish
Les bâtards. S’ils avaient été bruxellois, on aurait dit « zinneke », mais ils viennent de Gand. Bâtards de jazz (ils mélangent les styles, les époques, les influences), bâtards de musiciens (ils ne font pas la différence entre les générations ni les origines). Et « rieurs » avec ça ! Car, pour eux, tout cela n’est qu’amusement, détournements, explorations et plaisirs. Et ça fait presque dix ans que cela dure. Initié par le saxophoniste Michel Mast et le guitariste Jan-Sebastiaan Degeyter, Laughing Bastards s’est complété au fil des ans par l’arrivée de Marcos Della Rochas (dm), de Cyrille Obermüller (fb) et, récemment, d’Éline Duerinck (cello). Fetish (qui est aussi le titre d’un des morceaux de l’album, qui louvoie entre ballade mélancolique et ritournelle ensoleillée) nous embarque sur des chemins de traverse. On passe de la musique de chambre baroque ou médiévale (« Red Lemon ») à un pseudo reggae rasta nonchalant (« Sand ») puis à un jazz aux accents pop (« Tigraman »).
Souvent soutenu ou innervé par le violoncelle, qui apporte une couleur particulière et évoque autant la nostalgie que l’optimisme, ainsi que par une guitare aux effets de reverbes « aquatiques », le quintette ouvre bien grand les paysages sonores. Les impros inventives et bienveillantes (à ne pas prendre dans le sens de « gnangnan ») soulignent autant l’écoute collective que le sens des mélodies. Comment, par exemple, ne pas succomber à « Turquoise » qui, dans sa douceur, garde toute sa pétillance. À souligner aussi cette merveilleuse reprise, toute en montagnes russes, qu’est « The Train and The River » de Jimmy Giufree. Ah, les bâtards, ils peuvent sourire, ils nous ont bien eus !