Le dossier Intervalles du mois – décembre : Démystifier le jazz… 3) Quelques musiciens de rock que les amateurs de jazz doivent découvrir

Le dossier Intervalles du mois – décembre : Démystifier le jazz… 3) Quelques musiciens de rock que les amateurs de jazz doivent découvrir

En partenariat avec radio Équinoxe FM (105.0 à Liège et en streaming), JazzMania vous proposera tous les mois un dossier musical spécifique. Chaque mois, un thème, toujours choisi sous le signe de la (re)découverte, en mots et en sons.

Comment démystifier le jazz ? Comment faire en sorte que certains d’entre vous abordent ce genre musical sans ressentir cette fâcheuse impression d’en être exclu ? C’est la mission que l’on se donne dans un feuilleton de cinq épisodes. Jazz et rock, puis inversement. C’est pas chou vert et vert chou, mais il y a des accointances, forcément. Pour ce troisième épisode (et pour le suivant aussi), on propose aux amateurs de jazz d’écouter un peu de rock.

Intervalles #357 – Equinoxe FM On démystifie le jazz ! 3/5 Le rock pour les amateurs de jazz

1) Talk Talk : After the Flood (« Laughing Stock ») – Verve

Lorsque j’ai eu l’idée de mettre sur les rails un feuilleton ayant pour objectif de démystifier le jazz, j’ai tout de suite imaginé consacrer l’un de ses épisodes aux groupes de rock que les amateurs de jazz se devaient de découvrir. Histoire d’ouvrir la porte du jazz aux rockers puis de procéder de façon identique dans l’autre sens par après. Et lorsque j’ai préparé la playlist de cette émission spéciale, je me suis aperçu qu’une seule heure ne suffirait pas. C’est donc le premier des deux volets « les groupes de rock auxquels les amateurs de jazz doivent s’intéresser » que nous entamons ce soir.

Et de quelle façon ! Au milieu des années 80, le groupe Talk Talk baigne dans l’euphorie du succès. Mais en vérité, ils ont d’autres objectifs. Ce succès, ils ne s’y accrochent pas à tout prix. En 1988 sort un premier OVNI : « Spirit of Eden » qui s’apparente à un véritable suicide commercial. De fait, l’album ne se vend pas à l’époque. Il se rattrapera largement avec le temps pour devenir un album culte. Mais ils s’en foutent et Talk Talk récidive trois ans plus tard avec « Laughing Stock » dont nous venons d’écouter un extrait. La recette est identique. Les musiciens improvisent longuement en studio et, au montage, on supprime des parties ou des instruments pour finalement aboutir à l’ossature « Laughing Stock » qui sera publiée, mais oui, par Verve, la succursale jazz du label Polydor.

2) Bath Gibbons : Funny Time of Year (« Out of Season ») – Go Beat

Bien évidemment, le personnage central de Talk Talk, c’est leur chanteur, Mark Hollis (décédé il y a six ans et dont je vous conseille vivement l’écoute de l’unique album solo). Soit, mais il y a aussi d’autres personnalités dans le groupe. Le bassiste notamment, Paul Webb qui, à la séparation de Talk Talk, se lance lui aussi en solo sous le nom de Rustin Man. C’est sous ce nom-là qu’il collabore avec la chanteuse de Portishead Beth Gibbons, ce qui débouchera sur l’enregistrement d’un album incontournable paru en 2002, « Out of Season ».

3) Tricky : Aftermath (« Maxinquaye ») – Island

Beth Gibbons, Portishead, vous le savez, c’est Bristol, une ville associée dans les années nonante au mouvement Trip hop. Un mouvement qui multiplie les emprunts au jazz qui voit éclore aussi un personnage atypique, Tricky, qui quitte Massive Attack pour se lancer en solo avec un premier album très réussi « Maxinquaye ».

4) Einstürzende Neubauten : Isso Isso (« Kampen – amp (Alien pop music) ») – Potomak

Nous démystifions donc le jazz. Plus précisément, on essaye d’abattre les frontières qui s’érigent entre amateurs de pop / rock et de jazz. Ici, on propose aux amateurs de jazz de découvrir neuf groupes de rock. Celui-ci est allemand et a déjà joué dans des festivals de jazz. Certes, Einstürzende Neubauten – c’est d’eux qu’il s’agit – s’est nettement assagi avec les années, devenant pratiquement un groupe de rock mélodique. Mais l’esprit est toujours là. Quarante-cinq ans après leur formation à Berlin, Einstürzende Neubauten existe toujours, ils tournent toujours – je vous conseille de les voir en concert – et l’année dernière, ils publiaient un nouvel album : « Kampen » judicieusement sous-titré « Alien pop music ».

5) David Sylvian : Nostalgia (« Brilliant Trees ») – Virgin

Un peu à l’instar de Talk Talk que nous écoutions en ouverture, David Sylvian a lui aussi radicalement changé de voie musicale. Il faisait partie du groupe de pop Japan, un groupe qu’il dissout pour entamer une carrière solo en 1984. Curieusement, tout change alors que ses ex-collègues participent massivement à l’enregistrement de son premier album, « Brilliant Trees ». Le carnet d’adresses de Sylvian est plutôt bien fourni puisqu’apparaissent également au générique de cet album quelques musiciens de jazz renommés comme Kenny Wheeler, Mark Isham ou encore Jon Hassell.

6) James / Brian Eno : Maria (« Wah Wah ») – Fontana

Dans ce « sons et mots », nous jouons dans le crossover puisque nous conseillons aux amateurs de jazz l’écoute de quelques groupes associés au rock ou à la pop, groupes qui pourraient les intéresser…

Honnêtement, le groupe que nous allons entendre, les James, n’est pas un groupe particulièrement intéressant. Néanmoins, James va se démarquer du rock indépendant, non pas avec l’album « Laid » qui sort en 1993, mais bien avec son travail de remix intégral de celui-ci, effectué à l’initiative de leur producteur, Brian Eno. Résultat, un ovni basé sur la recherche sonore, « Wah Wah ».

7) David Lynch : Noah’s Ark (« Crazy Clown Time ») – PIAS

Parmi les Ovni sonores du monde du rock qui pourraient bien intéresser les amateurs de jazz, il y a l’album « Crazy Clow Time », un album attribué au cinéaste David Lynch mais en vérité construit essentiellement à quatre mains avec le producteur Dean Hurley qui avait déjà coloré musicalement le cinéma de Lynch à l’époque de la série « Twin Peaks ». Avec cet album, Lynch fait du Lynch : c’est un peu glauque, un peu tendu et très jouissif.

8) Sixteen Horsepower : Flutter (« Folklore ») – Glitterhouse/p>

Plus conventionnel mais tout aussi possédé que Lynch, il y a ce fabuleux chanteur, David Eugene Edwards, que tout amateur de jazz doit également découvrir. Son univers musical est unique, spirituel en fait. Un univers que l’on a d’abord découvert en trio avec Sixteen Horsepower, puis dans une formule à géométrie variable avec Wovenhand, les mains jointes en signe de prière. Voici David Eugene Edwards, version Sixteen Horsepower : « Flutter ».

9) Kate Bush : Snowflake (« 50 Words For Snow ») – Fish People

On approche tout doucement de la fin de ce « sons & mots ». Parmi les reines de la musique pop, il y en a une qui a démontré une fameuse ouverture d’esprit, vers le jazz notamment. Souvenez-vous, nous lui avons consacré trois émissions spéciales qui sont toujours disponibles sur le site de JazzMania (dans l’onglet antholo-jazz). Oui, c’est avec Kate Bush que nous clôturons le troisième épisode de notre saga « démystifions le jazz ». Cinquante mots pour désigner la neige…

Intervalles sur Equinoxe FM
Chaque mardi à 22 heures (rediffusion le jeudi, 22 heures)

Yves Tassin