Le dossier Intervalles du mois – Juin : Leonard Cohen #2

Le dossier Intervalles du mois – Juin : Leonard Cohen #2

En partenariat avec la radio Equinoxe FM (105.0 à Liège et streaming), JazzMania vous proposera tous les mois un dossier musical spécifique. Chaque mois un thème, toujours sous le signe de la (re)découverte.

Leonard Cohen nous a quittés il y a déjà sept ans, mais il reste bien présent sur nos platines et dans nos bibliothèques. Nous retraçons ici son parcours, sans nécessairement nous attarder sur le répertoire le plus emblématique. Sa vie (ses doutes), son œuvre (ses certitudes) en quelques chansons, en quelques interprétations… Pour ce numéro spécial, un fil rouge… Les Femmes !

1. Jean-Louis Murat : Avalanche IV (« I’m Your Fan ‐ the Songs of Leonard Cohen ») ‐ Oscar

Place aujourd’hui à la suite de notre feuilleton mensuel consacré à Leonard Cohen. Un épisode très particulier puisqu’on s’attachera uniquement à un pan bien connu de la personnalité de Leonard Cohen : la séduction. Avant d’entamer ce trait particulier du caractère de Cohen, il était intéressant d’en comprendre le pourquoi. En vérité, et c’est le journaliste / musicologue parisien Gilles Tordjman qui le souligne dans une biographie consacrée à Cohen en 2006 : « Leonard Cohen est un narcissique qui se déteste ».

Son album « Songs of Love and Hate » paru en mars 1971 en est une parfaite illustration, tout particulièrement « Avalanche », le titre qui ouvre l’album. On écoutait la version qu’en a faite Jean-Louis Murat pour les besoins d’un album hommage : « I’m Your Fan », 1991, avec un texte traduit au mot à mot.

Cohen et les femmes, ce sera notre fil rouge de cet épisode.

2. Leonard Cohen : So Long, Marianne (« Songs of Leonard Cohen ») ‐ Columbia

À en croire Leonard Cohen, Marianne Ihlen, sa première compagne qui apparaît au verso de la pochette de « Songs From a Room », sera la plus importante de toutes. Il la rencontre en 1960 sur l’île d’Hydra où il vient d’acheter sa maison. Elle et son fils ont été abandonnés là-bas par l’écrivain norvégien à succès Alex Jensen. Ils vivent une histoire d’amour et de trahisons (en ce qui concerne Cohen) durant huit ans. Pour Cohen, Marianne est une muse. Peu de temps avant de décéder, elle se sait mourante et elle reçoit une lettre de Leonard Cohen avec ces mots bouleversants : « Marianne, sache que je suis juste derrière toi. Si proche que si tu tendais la main, je pense que tu pourrais prendre la mienne. » Et en effet, Leonard Cohen mourra quelques mois plus tard.

3. Leonard Cohen : Is This What You Wanted (« New Skin for the Old Ceremony ») ‐ Columbia

Avec la suivante, Suzanne Elrod, il vivra un amour nettement moins idyllique. Elle est la mère des deux enfants de Leonard Cohen – notamment Adam Cohen devenu lui aussi un musicien. Leur séparation après neuf années de vie commune anéantit Cohen. Elle fuit avec les enfants dans le sud de la France. Toute la rancœur et la haine de Leonard Cohen envers Suzanne Elrod se trouvent dans cette chanson : « Is This What You Wanted » où il la compare à la bête de Babylone, soit, dans le Nouveau Testament, la mère des prostituées et des abominations de la terre.

4. Leonard Cohen : I’m Your Man (« I’m Your Man ») ‐ CBS

Rappelons pour la forme que la « Suzanne » chantée par Cohen en 1967 est en vérité une certaine « mademoiselle Verdal » qui n’a rien à voir avec sa compagne Suzanne Elrod. Leonard Cohen se remet enfin de cette histoire peu passionnelle et s’engage sentimentalement de 1982 à 1987 avec la photographe Dominique Issermann qui réalisera pour lui les clips de deux chansons à la fin des années quatre-vingt, dont « First We Take Manhattan ». Une chanson emblématique de Leonard Cohen lui est dédiée : « I’m Your Man ».

5. Anjani : Thanks for the Dance (« Blue Alert ») ‐ Columbia

Leonard Cohen prend de l’âge, il va bientôt atteindre les septante ans, mais cela ne l’empêche pas de demeurer un séducteur. Celle qu’il va séduire, Anjani Thomas, sa choriste durant les années quatre-vingt, est belle, elle a vingt-cinq ans de moins que lui. Ils s’associent artistiquement, ce qui débouche sur l’album « Blue Alert », publié sous le nom d’Anjani. En clôture, il y a ce magnifique texte de Cohen qu’Anjani a mis en musique et qui sera aussi le titre de l’album de Cohen sorti à titre posthume, en 2019 : « Thanks for the Dance ».

6. Big Brother & the Holding Company : Summertime (« Cheap Thrills ») ‐ Sony

Nous l’avions évoqué lors de la première partie de ce dossier consacré à Leonard Cohen, il a vécu un moment au célèbre Chelsea Hotel à New York. C’est là qu’il a rencontré un jour Janis Joplin, avec qui il a connu une très courte aventure. À ce sujet, Cohen dira : « Elle cherchait Kris Kristofferson et moi Lili Marleen. ».

C’est certain, ces deux-là n’étaient pas faits pour se compléter. Janis Joplin, l’incroyable Janis Joplin chante Gershwin : « Summertime ».

7. Leonard Cohen : Take This Longing (« New Skin for the Old Ceremony ») ‐ Columbia

Il y a une femme qu’il n’a pas pu séduire. Une femme dont il a été éperdument amoureux et qui a refusé toutes ses avances. Elle représentait la beauté glaciale allemande, lui, le Juif errant. Pour cette femme, il a composé cette chanson : « Take This Longing ».

8. Nico : These Days (« Chelsea Girl ») ‐ Polydor

Mais qui est cette jeune et magnifique femme qui aura été l’amante de Lou Reed, de Jim Morrison, d’Iggy Pop, de Dylan et même d’Alain Delon avec qui elle a eu un enfant que son père n’a jamais reconnu ? Cette femme qui s’est toujours refusée à Cohen ? Cette femme, c’est la chanteuse et mannequin Christa Päffgen, mieux connue sous le patronyme Nico.

Nico en 1967, « These Days », une chanson que l’on doit à Jackson Browne.

9. Leonard Cohen : Winter Lady (« Songs of Leonard Cohen ») ‐ Columbia

Une autre chanteuse, blonde elle aussi, comptera énormément pour Leonard Cohen. Joni Mitchell, qu’il rencontre lors du festival de Newport, en 1967. Coup de foudre absolu. Chacun écrit des chansons à l’attention de l’autre. Celle de Leonard Cohen adressée à Joni Mitchell a pour nom « Winter Lady ».

10. Joni Mitchell : Rainy Night House (« Ladies of the Canyon ») ‐ Warner Bros

Joni Mitchell, un cas à part puisqu’ils resteront amis toute leur vie. Un cas à part aussi, car dans ce cas, les rôles s’inversent : c’est Leonard Cohen en vérité qui joue le rôle de la muse. En effet, il existe quelques chansons de Joni Mitchell qui se font très clairement l’écho de leur aventure sentimentale. Comme ce très beau « Rainy Night House » que l’on retrouve en 1970 sur l’album « Ladies of the Canyon ».

11. Leonard Cohen : Sisters of Mercy (« Songs of Leonard Cohen ») ‐ Columbia

On l’a vu lors du premier épisode de notre feuilleton, Cohen prend beaucoup de temps pour écrire une chanson. Il y a une exception qui découle d’une anecdote amusante. Il effectue à l’époque une tournée de lecture au Canada et il invite dans sa chambre deux jeunes voyageuses qui se trouvent à la rue. Il imagine un beau plan à trois, sinon que les deux jeunes filles, épuisées, s’endorment tout de suite dans le lit de leur hôte qui écrira cette nuit-là « Sisters of Mercy », « les sœurs de la Miséricorde ».

12. Leonard Cohen : Happens to the Heart (« Thanks for the Dance ») ‐ Sony

Et oui ! Cohen et les femmes, c’est un peu compliqué. Surtout quand la trahison s’en mêle. Cette trahison vient d’une amante en qui Cohen fait une confiance aveugle, et qui est aussi sa manageuse au début des années 2000. Elle s’appelle Kelley Lynch. Non seulement elle a tapé dans la caisse, faisant disparaître plusieurs millions de dollars, mais en plus, elle a vendu tout le catalogue de Leonard Cohen sans rien lui dire. Leonard Cohen est ruiné, il fait des tournées pour se requinquer et prétend qu’après tout, ce n’est pas très important…

Leonard Cohen fait le point sur cette histoire dans son album posthume : « Happens to the Heart ».

13. Leonard Cohen : Paper-Thin Hotel (« Death of a Ladie’s Man ») ‐ Columbia

Nous voici arrivés au bout du fil rouge que nous avons tendu autour des déboires amoureux de Leonard Cohen. Dans un mois, troisième chapitre du Feuilleton Cohen. Car oui, nous avons encore pas mal de choses à découvrir ensemble !

Le pire sans doute provient de cette étrange collaboration qui unissait Leonard Cohen et le producteur déjanté Phil Spector. À eux deux, ils ont commis un album qui a fait couler pas mal d’encre et de larmes : « Death of a Ladies’ Man », le titre idéal pour clôturer ce chapitre !

Intervalles sur Equinoxe FM
Chaque mardi à 22 heures (rediffusion le jeudi, 22 heures)

Yves Tassin