Les rééditions Candid, une source inépuisable de grandes (re)découvertes

Les rééditions Candid, une source inépuisable de grandes (re)découvertes

Kenny Barron Trio
Lemuria-Seascape
Candid Records

Conçu le 17 janvier 1991 dans les studios Van Gelder d’Englewood Cliffs, « Lemuria-Seascape » fait partie de ces bijoux enregistrés par l’immense pianiste de Philadelphia, qui fête aujourd’hui même ses 80 printemps – j’écris ces lignes le 9 juin. L’art de Kenny Barron est aussi de s’entourer d’une rythmique de classe, ici Ray Drummond et Ben Riley, comme il le fit déjà six ans plus tôt avec « Scratch » entouré de Dave Holland et de Daniel Humair, ou comme il le fera encore prochainement aux Dinant Jazz, entouré de Jonathan Blake et Kiyoshi Kitagawa (le 29 juillet, à ne pas manquer !) Les deux titres éponymes composés par Barron ouvrent et clôturent un album où brillent quelques standards. « Ask Me Now » s’éloigne des décalages monkiens pour se transformer en une douce mélodie où la contrebasse suit le thème sur le piano. En forme de calypso, « Fungii Mama » emballe le tempo avec une section rythmique où s’éclate Ben Riley, avant une pause bluesy avec une de ses compos « Slow Grind » en solo. Les standards « Have You Met Miss Jones ? » et « You Go to My Head » encadrent une bossa-nova peu connue « Maria Isabel ». « The Magical Look in Your Eyes » nous rappelle que Barron fut aussi l’indispensable pianiste des sessions de Stan Getz avec Victor Lewis et Rufus Reid, ce dernier étant le compositeur de cette valse magnifique.

Joanne Brackeen
Snooze
Candid Records

Et tant qu’à parler de Stan Getz, voici une pianiste qui a participé à plus d’une session avec le saxophoniste : Joanne Brackeen. La rythmique de cet album « Snooze », enregistré en 1975, n’a rien à envier au précédent opus : Cecil McBee et Billy Hart ! Influencée par McCoy Tyner, Chick Corea ou Herbie Hancock, Joanne Brackeen fait preuve d’un dynamisme constant sur les sept titres parmi lesquels « Circles » de Miles Davis et « Nefertiti » de Wayne Shorter, ou encore « Old Devil Moon » qu’elle développe ici sur de nouvelles structures. Une pianiste qui mérite d’être redécouverte.

Shirley Scott
A Walkin’ Thing
Candid Records

Dix ans avant sa mort d’un arrêt cardiaque, Shirley Scott enregistre cet album pour Candid, aussi au Studio Van Gelder. A 57 ans, la pianiste-organiste est encore en pleine possession de ses moyens et délivre un album en quintet aussi dynamique qu’entraînant. En ouverture sur un rythme latin, l’organiste propose « Carnival » qui n’est autre que l’hymne national du Panama. « When a Man Loves a Woman » a des couleurs quasi religieuses. Quelques standards complètent le programme, dont une belle composition de Benny Carter qui donne son titre à l’album, avec des solos de Terell Stafford à la trompette et de Tim Warfield au ténor, ce dernier compositeur d’un hommage à Art Blakey intitulé « Shades of Bu ». Il n’y a rien à jeter dans cet album inspiré et chaleureux.

Jean-Pierre Goffin