Matt T Mahony : Good Man Blues

Matt T Mahony : Good Man Blues

Autoproduction

Depuis plusieurs années, le nom de Matti De Rijcke, alias Matt T Mahony, fait le buzz de la scène blues gantoise. Il a d’ailleurs enregistré son premier album au célèbre club Missy Sippy où il anime les très appréciées « Sunday sessions ». Il aura fallu patienter longtemps pour obtenir une suite, mais « Good Man Blues » valait la peine d’être attendu. Sorti en 2019, l’album « Live At Missy Sippy » est entièrement imprégné d’un style blues électrique et éclectique sur lequel brille un guitariste hors pair. Une attention toute particulière est portée aux deux reprises audacieuses, « Jive Samba » de Nat Adderley (!) et « Outside Woman Blues » du très sous-estimé Blind Joe Reynolds. Le morceau torride « Sideways », d’une durée de 12 minutes, justifie à lui seul l’achat de l’album. Dans son propre « Shutdown », il a peut-être chanté « I don’t believe in a fairytale » lors de ce premier enregistrement, mais avec « Good Man Blues », il y a maintenant un prolongement. Pourtant, avec des sujets tels que la dépression, la course quotidienne effrénée et éprouvante nerveusement, la vie nocturne presque meurtrière et une relation qui a mal tourné, l’album, il est vrai, n’offre pas de quoi nous réjouir. D’un point de vue musical, Matt a opté pour une approche moins agressive. Alors que l’album « Live At Missy Sippy » était presque constamment sous tension, « Good Man Blues » est le disque d’un guitar hero plus contrôlé. Le morceau d’ouverture « Muggy Days » sonne déjà comme un cri primal surgissant des marécages. Il s’agit d’un blues de lamentation entaillé avec un impact déchirant apporté par quelqu’un qui laisse une traînée de désespoir derrière lui. Du Daniel Lanois à l’état pur ! Sur le même rythme lent, le morceau suivant « On Time » aborde les thèmes brûlants du stress, de l’épuisement professionnel et de l’utilisation excessive des écrans. Mahony et sa guitare se font les chroniqueurs de la société d’aujourd’hui. Nous découvrons ensuite « Run Away », un morceau d’un tout autre calibre. Mahony nous propose un blues routier serré, coloré par le jeu d’harmonica de Vander Bauwede. L’ultra-court « It Happens (Again) » est un exemple typique de « jump & jive ». Ensuite, « True Bird » résonne comme une note positive adressée à une âme sœur. Il y a des similitudes avec « Bird Of Paradise », le tube de Snowy White à l’époque. Voilà pour la face A. La face B commence à nouveau avec une langueur pénible. La guitare et l’harmonica se complètent au ralenti. « Jetlagged » évoque la sensation de claustrophobie éprouvée par Mahony lorsqu’il a été enfermé dans une chambre d’hôtel pendant dix jours suite à l’apparition du Covid-19. « The Big Spender », morceau très sombre, suit de près, tout comme « Spirits ». « I Don’t Want To » est un détournement nocturne vers un bar local où le boogie rauque est la bande-son familière de la cabane. Le dernier morceau est un apitoiement sincère de Mahony. Un blues qui nous transperce de part en part. Après avoir écouté cet air profondément mélancolique et sombre, une bouteille de Blanton’s « The Original Single Barrel Kentucky Straight Bourbon Whiskey » ne sera certainement pas de refus.

En partenariat avec Jazz’Halo

Georges Tonla Briquet
Traduction libre : Alain Graff