One Shot : À James

One Shot : À James

Le Triton / L’autre distribution

James, c’est James Mac Gaw, un guitariste franco-écossais qui intégra la nouvelle formation de Magma en 1997 et enregistra avec eux plusieurs disques dont celui de la renaissance, « Kohntarkkosz Anteria ». A la fin des années 1990, il forma avec le batteur Daniel Jeand’heur et deux autres musiciens de Magma, Emmanuel Borghi (claviers) et Philippe Bussonnet (basse), le quartet One Shot, dont la musique s’abreuvait au mouvement « zeuhl » ainsi qu’aux expériences « progressives » de groupes légendaires comme King Crimson et Soft Machine. Entre 1999 et 2008, ce line-up de One Shot sortit quatre compacts de jazz-rock intense qui ont traversé la décennie comme des comètes attirant dans leur sillage les amateurs du genre. Après le remplacement d’Emmanuel Borghi par Bruno Ruder, également claviériste chez Magma, l’aventure a continué jusqu’à la mort de James Mac Gaw en 2021 qui aurait pu y mettre un terme définitif. Mais le 9 octobre 2021, One Shot, dans une configuration inédite qui réunissait les deux claviéristes, décida de rendre hommage à leur ami disparu en donnant un concert au Triton, dont l’enregistrement figure sur cet album.

« Def Mk1 » nous plonge d’emblée dans l’univers zeuhl si particulier de Magma, mais dans sa composante la plus jazz-rock. Et avec les voix opératiques en moins, c’est comme si les Klingon étaient partis, ne laissant qu’une marée de corps célestes en mouvement. La musique est envoûtante grondante, et récursive aussi avec des motifs qui reviennent en spirale. Evidemment, l’absence de guitare se fait remarquer mais elle est compensée par la présence des deux claviéristes qui s’en donnent à cœur joie, le Fender Rhodes de l’un coopérant avec le synthé de l’autre dans d’impétueux échanges et des développements volcaniques. Les cinq morceaux, qui dépassent tous les 10 minutes, sont propices à l’installation d’ambiances globalement dramatiques et à des improvisations intenses, le tout sur une rythmique de plomb dominée par le son de basse tellurique de Philippe Bussonnet.

Sur « I Had A Dream – Part III & IV », la course ralentit tandis que fleurissent de mystérieuses dissonances évoquant la bande son d’un antique film de science-fiction. Le disque se referme sur le frénétique « Ewaz Vader » pour lequel One Shot a invité le guitariste Jim Grandcamp (entendu au sein du Electric Epic de Guillaume Perret) dont les zébrures électriques renforcent encore l’impact de cette musique tumultueuse.

Les amateurs des formations précitées et, plus globalement, des courants « zeuhl » et « canterbury » apprécieront cette résurgence étourdissante de One Shot qui conduira certainement le groupe à écrire une nouvelle page de son histoire.

Pierre Dulieu