Otto : Danses
Reprendre Bach n’a jamais été exercice aisé. L’histoire de la musique le tient comme figure tutélaire unanimement reconnue, l’élevant au rang de compositeur quasi-sacré, déifié, inattaquable, intouchable. Et pourtant, il n’a cessé d’inspirer, à toutes époques, des cohortes entières de musiciens, chevronnés ou apprentis. Les emprunts à ses opus sont légion. Les hommages ne sont pas en reste. Le duo Otto entend pour sa part revisiter, réinventer même, certaines de ses pièces de danse les plus emblématiques. Le guitariste Ivann Cruz et le batteur Frédéric L’Homme se sont réunis autour d’une chaconne avant de s’aventurer dans les suites pour luth et violoncelle. « Danses » est le résultat de cette aventure. Point de luth ou de violoncelle ici, pas même de piano. Les seules cordes sont celles de la guitare électrique de Cruz qui résonnent et se détachent sur la rythmique allègre, aérée de L’Homme. Les bourrées et les gigues ont fière allure, avec parfois d’étonnantes couleurs de swing. Les allemandes et les préludes apparaissent plus complexes à restituer, reposant sur des arrangements dont on sent qu’ils ont dû être remis sur le métier à maintes reprises pour enfin faire mouche. La pièce phare de l’album est sans aucun doute la « Chaconne », finement ciselée, travaillée à l’envi sur près d’un quart d’heure. En oscillant entre les débords de joie de danses anciennes et les échos de la mélancolie baroque, elle restitue au maître son éternelle jouvence et sublime la contemporanéité de son œuvre.