Patrick Deltenre & Ivan Paduart : Inner Travels

Patrick Deltenre & Ivan Paduart : Inner Travels

Pavane Records

« Inner Travels » marque le retour – cette fois sur Pavane Records, un label belge indépendant spécialisé en musique classique et dont c’est la première production jazz – d’un tandem de longue date : le guitariste Patrick Deltenre et le pianiste Ivan Paduart qui travaillèrent déjà ensemble sur « Illusions Sensorielles » sorti en 1993. Après « Hand In Hand » (2018) et « Ear We Are » (2020), les voici à nouveau réunis pour un répertoire de dix titres composés par l’un ou l’autre des deux complices ou cosignés. Les deux albums précédents nous avaient introduit à un jazz « cool » et/ou « mainstream » d’essence européenne : « Inner Worlds » perpétue cette tradition toujours marquée par une évidente appétence similaire des deux leaders pour un matériel thématique harmonieux et mélodique. « Thalys », inspiré par le célèbre train à grande vitesse, ouvre l’album sur ce qui semble être la cadence la plus enlevée de cet album. La rythmique composée de Philippe Aerts à la contrebasse et de Steve Shehan aux percussions est enjouée tandis que les deux solistes s’en donnent à cœur joie pour faire l’éloge de la vitesse tout en gardant un œil professionnel sur les cadrans « mélodie » et « accessibilité ». En revanche, des titres comme « Resilience », « Pile ou face » ou « Forbidden Love » se caractérisent par une écriture chambriste qui fait la part belle à un lyrisme à fleur de peau et à des sonorités cristallines, l’entente entre les deux solistes, nourrie par des années de connivence, se manifestant d’une éclatante manière. Trois morceaux sont agrémentés de vocalises et/ou de paroles chantées par Sinne Eeg et, pour deux d’entre eux, par Raphaëlle Brochet, ce qui en amplifie encore le côté apaisant et onirique, en particulier le très beau « Mauritius ». Enfin, « No Fear » a un petit côté pop avec sa pulsation légère qui en ferait aisément un hymne estival pour accompagner les longs couchers de soleil rougeoyants. Ces voyages intérieurs n’ont bien sûr rien de sombre ni de tourmenté : s’ils plongent dans l’intimité, c’est pour mieux y chercher la source d’un certain bien-être.

Pierre Dulieu