Penguin Cafe : Rain Before Seven...
Erased Tapes Records / Konkurrent
En 1972, le guitariste Simon Jeffes créa le Penguin Cafe Orchestra qui joua pendant 24 ans une musique hybride incluant des éléments de classique, d’art-rock, de minimalisme et de folk. Plus de dix ans après la mort de son père, Arthur Jeffes reprit le flambeau familial en fondant en 2009 le Penguin Cafe dont la mission était de prolonger la vision excentrique d’origine en associant une approche d’antiquaire à une innovation respectueuse. « Rain Before Seven… » est leur cinquième album qui offre dix compositions, toutes écrites par Arthur seul ou en collaboration avec son violoniste et directeur musical Oli Langford. Parmi celles-ci, « Find Your Feet » est peut-être, avec « Galahad » dont le style lui est similaire, l’un des titres les plus emblématiques du nouveau répertoire : une mélodie simple portée par une rythmique constituée d’un mélange complexe de percussions qui donne l’illusion d’une programmation électronique à base de boucles répétitives. L’ombre du grand John Cage plane sur cette composition qui n’est pas sans évoquer non plus les groupes de new-wave minimalistes et romantiques des années 80.
Le premier album du Penguin Cafe Orchestra fut édité en 1976 sur le label expérimental Obscure Records de Brian Eno, créant ainsi un lien indéfectible entre le groupe et certains artistes considérés comme des compositeurs majeurs de la musique classique du XXe siècle. C’est à l’un d’entre eux, Harold Budd, qu’est dédié « In Re Budd ». Jouée sur un piano droit préparé pour en accentuer le rebond, cette joyeuse danse à l’énergie enfantine, colorée par un balafon et une atmosphère cubaine, rend justice au compositeur contemporain dont l’esprit était ouvert à tous les possibles. Si le travail sur les rythmes aura indéniablement été le fil d’Ariane de l’élaboration de ce nouveau disque, la filiation avec le PCO d’origine reste très apparente comme en témoigne les rêveries « ambient » à géométrie variable que sont « Temporary Shelter From The Storm », « Second Variety », le thème folklorique de « Goldfinch Yodel » et le fascinant « No One Really Leaves » avec sa splendide partie crescendo de violoncelle. Enfin, on mentionnera encore « Welcome to London » qui ouvre l’album en célébrant avec panache l’alchimie singulière de ce groupe et rappelle, par sa proximité avec les hymnes d’Ennio Morricone, que cette musique a aussi un potentiel cinématographique.
Simon Jeffes fut un innovateur et son fils, qui fait fructifier son héritage, ne l’est pas moins. En poursuivant l’œuvre familiale, il continue d’arpenter de nouvelles terres musicales, inventant des sons en clair-obscur qui résonnent, dans le silence d’une pièce close, comme de la pure poésie.