Ray Russell : Fluid architecture
Ray Russell, aujourd’hui âgé de 73 ans, est ce que l’on pourrait appeler un célèbre inconnu. Ce guitariste anglais, dont la discographie est forte d’une vingtaine d’albums sous son nom, a commencé sa longue carrière en intégrant, dès l’âge de 15 ans, le John Barry Seven. Ses premiers enregistrements datent des musiques de films des James Bond des sixties (il participera à sept films du célèbre agent). Ensuite il rejoint le groupe de Georgie Fame puis ce sera Nucleus, Stackridge et bien d’autres ! En tant que musicien virtuose et très demandé on le retrouve derrière Van Morrison, Chris Spedding, Jack Bruce, Cat Stevens, Bryan Ferry et, plus étonnant, derrière Julien Clerc et Julio Iglesias (ça devait bien rapporter!). Il joue, en tant que musicien de session, sur une quantité incroyable de morceaux connus (Tina Turner, David Bowie, Heaven 17…), et il a participé au fameux « Secret Policeman’s Concert » derrière Clapton, Beck et d’autres ! Il est aussi un producteur renommé et un compositeur pour des séries télévisées anglaises et américaines. Il a créé une librairie musicale nommée « Made up Music » et est récemment apparu à la télé anglaise en mettant aux enchères une guitare que lui avait donnée Georges Harrison ! C’est vous dire, en quelques lignes, le palmarès de ce gars. Venons-en donc à ce nouvel album au titre lumineux, sur lequel il s’est entouré d’autres musiciens de studio, souvent producteurs et maîtres de leur instrument de prédilection. Le plus connu d’entre eux étant Simon Phillips, le batteur de Toto. Ray Russell et ses potes font une démonstration de leur talent sur un jazz fusion qui oscille entre puissance et intensité des compositions et moments beaucoup plus aériens, plus légers. Comme sur ce titre « The Conversation » inspiré par une discussion avec Jimi Hendrix qui faisait le support act de Cat Stevens ! Ou sur le court « One for Geoff » où il utilise simplement une guitare acoustique. Mais c’est essentiellement avec ses guitares électriques qu’il sculpte des sons, crée des ambiances fluides entre jazz, ambiant, landscape que résume déjà à lui seul le très beau et long premier morceau « Escaping the Six-string Cage ». En invitant d’autres musiciens, les titres s’étoffent et plongent dans le jazz rock avec des touches de free, de funk. On se sent un peu submergé, sur certains titres, par cette déferlante de guitares, cette démonstration de dextérité qui pousse vers la froideur que reflète déjà la pochette. Heureusement il semble en être bien conscient et laisse ses guests s’exprimer régulièrement avec une certaine liberté via de l’électronique, un chapman stick, des cuivres ou des claviers. Mais ce qui nous est souvent proposé, c’est de la démonstration par un musicien talentueux. Il y a un public pour… Pour moi, heureusement, il existe aussi ces radieux moments de douceur…
Claudy Jalet