Siamo solo noi au Centre culturel de Flémalle (25/01/25)

Siamo solo noi au Centre culturel de Flémalle (25/01/25)

Siamo solo noi © Pierre Bolle

Home sweet home !

On tombait la doudoune au fur et à mesure, la mesure qu’on avait envie de marquer, entrainés par le chapelet d’airs connus. L’atmosphère sentait le Sud, les spots rendaient le soleil et les images de vacances écharpaient les esprits. Et les deux, sur scène, l’un au chant, l’autre à la guitare, savaient comment y faire. Là, à l’instant, à l’entame de « Il ragazza de la via Gluck » de Celentano, Christian Legrève, le chanteur, a dû tirer sur le frein à main pour ne pas se faire déborder… Ben oui, c’est comme ça, c’est plus fort que tout ; pensez donc : un répertoire dédié au genre cantautori (auteurs-compositeurs ayant explosé il y a 50 ans en Italie), et ce dans une colonie italienne de la même époque, établie sur les hauteurs de la commune de Cools, avec vue sur les hauts-fourneaux de la vallée…

Christian n’est pas italien, mais il s’essaie à la langue. Forcément, ayant grandi là. Mais pas tant forcément que ça, puisque Frédéric Palermini, qui en a tout l’air, d’un italien, ne le parle pas. Alors, commencer par « Ma terre, que c’est beau de te regarder ! Que c’est beau de penser à toi ! » (Pino Daniele), ça la place, la carte de visite… Suivront Lucio Dalla – immense œuvre, inégalée -, Edoardo Bennato le plus rock, Lucio Battisti le gentil, Ricardo Cocciante le cosmopolite dispendieux, mais aussi Giovanna Marini, à la présentation peu amène – chaque morceau est introduit par une courte présentation, souvent drôle, sauf ici -, et tutti quanti….

Bercé, attendri, ému, alerté, le public balancera d’une époque à l’autre, d’un coin à l’autre de « son » Italie. Et la salle, comble, se laissera charmer par la gouaille de Christian, le jeu de guitare – toute neuve : en direct du luthier de Cabrel, Mr Cheval – sonnant et franc de Frédéric et leurs duos chantés aux moments forts. C’est que c’est un art, mon bon monsieur, de tenir la scène ainsi, tout nus, avec les spots monochromes, les modulations de voix où il faut s’accrocher et l’occupation de l’espace juste comme il faut pour ne pas lasser. Sans parler des paroles qu’on peut oublier. Et j’allais ajouter : et tout ça sans tacher la chemise aux aisselles… Non, sérieux, c’est une belle dynamique, mais périlleuse, avouons. Au passage, j’apprends de Frédéric qu’il s’essaie aussi à la composition. Voyez « Fred Lerpa » sur Youtube…

En peu de temps, le centre culturel aura affiché All is pretty (Quoi, vous connaissez pas le groupe de notre légendaire Thierry Devillers ?), Siamo solo noi et Antoine Hénaut. Un choix éclairé, que le public tient à honorer. L’air du temps, celui dont on pourra se rappeler, encore, à nouveau, c’est celui dont on se nourrit pour faire sens. Un indice ? Nous recevions, dernièrement, mes amis et moi, des amis de Vendée. Au détour d’une balade, un grain soudain nous a confinés dans un abri de fortune, in extremis. Plantés là comme des poireaux, on attend, et, quoi de mieux que de chanter, hein, pour conjurer le sort. En tout cas, c’est ce qu’ils se sont mis à faire, avec un air de chez eux. Bien de chez eux. Et nous ? Euh… On a à peine pu bredouiller un déconcertant « Elle mi l’avé tôdi promis… » à défaut de cramignon, aucun d’entre nous n’étant d’Hermalle. Nos estons fîrs dè nos ptite patrèye ne nous est revenu que plus tard, et encore, par lambeaux. La leur, de ballade, racontait leur histoire, une vraie histoire, et avec un allant sans pareil…

Ne me voyez pas chagrin ; tenez, hier encore, Christophe Pirenne, oui le professeur d’histoire de la musique et politiques culturelles à l’Uliège, était au conservatoire de Verviers devant un auditorium bien rempli à nous présenter l’histoire de la musique à Verviers. Attirant, l’exposé l’était à plus d’un titre, par la documentation fouillée et l’iconographie gratifiante, mais surtout, arrivé à l’époque contemporaine, chacun y est allé de son apport. Etrange sensation, une fois à la discussion libre, de voir se dessiner une histoire, vivante et vibrante.

www.siamosolonoi.be

Alain Croibien