Sultan Stevenson : El Roi

Sultan Stevenson : El Roi

Edition Records

Sans doute n’a-t-on encore jamais entendu parler de Sultan Stevenson, jeune pianiste anglais. Après un premier album « Faithful One » chez Whirlwind, Sultan Stevenson entre pour son deuxième opus dans la remarquable écurie de Edition Records. Avec la même rythmique depuis cinq ans – Jacob Gryn à la contrebasse et l’explosif Joel Waters à la batterie – on peut sans se fourvoyer parler d’un groupe rôdé et réactif. On le constate sur « El Roi », un titre qui fait référence à la foi de l’artiste et qui est interprété en quintet tout comme les deux pièces en ouverture, « Unspeakable Happiness » (expression reprise au film « Twelve Years A slave ») et « A Region in my Mind », avec Josh Short (trompette/bugle) et Soweto Kinch (sax ténor). Le son d’ensemble fait inévitablement penser aux grands quintets des années 50-60, un héritage dont le pianiste s’inspire aussi dans son jeu parfois très fouillé, parfois plus introspectif, mais toujours soutenu par une riche recherche harmonique et un sens inné du récit bien construit (citer McCoy Tyner et Ahmad Jamal comme référence est pleinement justifié).

Les cinq pièces centrales de l’album forment une suite en trio avec l’introspectif « Arise » en ouverture, que suit l’up tempo « My Unbelief ». « Purpose » et « I Believe » forment deux pièce lentes et inspirée par le gospel au mitan desquelles « Wisdom » offre au batteur la quasi intégralité des 2’41 du morceau. Tout en jouant sur les codes des maîtres qui l’ont inspiré (on pense aussi à Kenny Kirkland), Sultan Stevenson offre sur les huit pièces un langage original fondé sur un sens du récit sans fioritures et d’une belle sincérité. Un grand disque.

P.S : Sultan Stevenson s’est découvert un talent de couturier pendant le covid ! Les chapeaux qu’il porte sont de sa main.

Jean-Pierre Goffin