Tony Allen : There Is No End

Tony Allen : There Is No End

Blue Note / Universal

Quelques semaines à peine avant de décéder à Paris à l’âge de 79 ans, Tony Allen s’était entretenu avec Jean-Pierre Goffin – https://jazzmania.be/tony-allen-rejoice/ – auprès duquel il s’était inquiété de l’attitude passive d’une partie de la jeunesse : « (…) qui s’amuse beaucoup trop. Les smartphones, les jeux, internet… On reste enfermé chez soi et on ne fait rien. Je leur dis que ce n’est pas sérieux. C’est de la paresse, ce n’est pas ça la vie ! ». C’est probablement dans ce contexte, mais aussi parce qu’il a toujours été attiré par les explorations que le batteur nigérian s’est lancé dans ce projet inabouti, jusqu’à ce que ses proches collaborateurs le finalisent. De même, suivant la suggestion de ses producteurs, il avait fait appel un peu plus tôt à la nouvelle génération anglaise du jazz pour achever les sessions de « Rejoice », un opus enregistré avec son ami Hugh Masekela et publié lui aussi à titre posthume…

On le sait, depuis qu’il avait effectué une tournée aux States au milieu des années soixante avec Fela Kuti (dont il était le directeur artistique), Toni Allen s’était engagé en faveur de la lutte pour les droits civiques des peuples noirs. Groove et textes engagés : l’afrobeat, dont il était un des parrains, pouvait envahir la planète. Groove et textes engagés… Retranscrit à l’échelle d’aujourd’hui, on pense davantage au rap. Et on mesure bien, à l’écoute de « There Is No End », que Tony Allen a eu pour objectif de concilier jeunesse et implication politique. Alors, il s’est assis derrière les fûts et a préparé sur mesure une série de rythmes et de gimmicks sur lesquels de jeunes rappeurs et rappeuses issus du monde entier allaient pouvoir se déchaîner ! Remarquez qu’habituellement, les rappeurs « empruntent » des rythmes existants sur lesquels ils posent leur flow. Ici, Tony Allen leur a mâché la besogne… Et pour quel résultat ? Une fusion des genres. Mieux : un rapprochement entre générations et entre races. Il y a dans ce disques des pépites d’une modernité étonnante (« Stumbling Down » featuring Sampa The Great ou encore « Très magnifique » avec Tsunami au micro). Ces jeunes, auxquels il reprochait un manque de réaction, se sont retroussé les manches… Ça hip, ça chaloupe, ça hop… Tony Allen, la fin ?! Du veux rire !

Yves «JB» Tassin